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domingo, 7 de abril de 2024

Lexique roman; Habil, Abilh - Aderetar

H

H, s. m., huitième lettre de l'alphabet, h.


H, s. m., huitième lettre de l'alphabet, h.

Aquel H fay aqui so engal una consonan.

Leys d'amors, fol. 8.

Cet H fait là son égal à une consonne.

Aquesta significatio si deu scrieure ses haspiracio que es H.

Eluc. de las propr., fol. 225.

Cette signification se doit écrire sans aspiration qui est h.

Aquesta figura H no es letra, segon que dizo li actor.

(chap. Esta figura H no es (cap) lletra, segons lo que diuen los autós.)

Leys d'amors, fol. 5.

Cette figure H n'est pas lettre, selon que disent les auteurs.


Habil, Abilh, adj., lat. habilis, habile, apte, propre.

A recebre impressio de forma es plus habil.

Eluc. de las propr., fol. 130.

A recevoir impression de forme est plus apte.

Abilhs a recebre las enfluensas luminosas. L'Arbre de Batalhas, fol. 250.

Propre à recevoir les influences lumineuses.

CAT. ESP. (hábil) Habil. IT. Abile. (chap. Hábil, habils.)

2. Habilitat, s. f., lat. habilitatem, habileté, aptitude, facilité.

En lors movements... maior habilitat. Eluc. de las propr., fol. 131.

Dans leurs mouvements... plus grande facilité. 

CAT. Habilitat. ESP. Habilidad. PORT. Habilidade. IT. Abilità, abilitate, abiltade (abilitade). (chap. Habilidat, habilidats.)

3. Habilitar, Abilitar, v., exercer, rendre apte.

No devon autra causa pensar que si abilitar en armas.

L'Arbre de Batalhas, fol. 93.

Ne doivent autre chose penser que s'exercer aux armes.

Part. pas. Foro may habilitatz en operacio. Eluc. de las propr., fol. 9.

Furent davantage rendus aptes au travail.

CAT. ESP. PORT. Habilitar. IT. Abilitare. (chap. Habilitá: habilito, habilites, habilite, habilitem o habilitam, habilitéu o habilitáu, habiliten; habilitat, habilitats, habilitada, habilitades.)


Habit, Abit, s. m., lat. habitus, habit, vêtement.

E 'l tolgues l' abit de mongia. V. de S. Honorat. 

Et lui ôtât l' habit de monachisme. 

Prov. L' abit no fa pas bon religios.

(chap. L' hábit no fa bon religiós; ESP. El hábito no hace al monje.)

V. et Vert., fol. 65. 

L' habit ne fait pas le bon religieux.

- Port, contenance, complexion.

Aquel qu' es amayres a l' habit, so es la maniera e 'l saber d'amor.

Leys d'amors, fol. 50. 

Celui qui est amoureux a la complexion, c'est-à-dire la manière et le savoir d'amour.

CAT. Habit. ESP. (hábito) PORT. Habito. IT. Abito. (chap. Hábit, habits.)

2. Habiti, Abiti, s. m., habit, vêtement.

De sancta mongia l' abiti lur a dat.

Ell e son filh vesti d' abiti de mongia. 

V. de S. Honorat.

De saint monachisme leur a donné l' habit.

Lui et son fils il vêtit de l' habit de monachisme.

3. Habilhament, s. m., habillement.

Exceptat son habilhament.

Fors de Béarn, p. 1088.

Excepté son habillement.

Que la confrairia aya habillamens per ela.

Tit. de 1535. DOAT, t. XC, fol. 212.

Que la confrérie ait habillements pour elle.

ESP. Habillamiento (vestimenta). (chap. Vestit, vestits; vestimenta, vestimentes.)


Habitar, Abitar, v., lat. habitare, habiter, demeurer.

Doncx ges no deu hom valens habitar 

Ab home ric, vil, escas e tenen.

R. Gaucelm de Beziers: Un sirventes. 

Donc homme de mérite ne doit point habiter avec homme puissant, vil, avare et tenace. 

So es pueg hont Dieus habita. V. et Vert., fol. 65.

(chap. Aixó es lo puch aon Deu habite.)

C'est montagne où Dieu habite. 

L' islla tornara guasta... 

E non s' abitara de cinquanta tres ans. 

(chap. La isla se tornará deserta... y no se habitará en sincuanta tres añs.)

V. de S. Honorat.

L'île redeviendra déserte... et ne s'habitera de cinquante-trois ans. 

Fig. Dels sancts e de las sanctas que habiton en Dieu. V. et Vert., fol. 58.

(chap. Dels sans y de les santes que habiten en Deu.)

Des saints et des saintes qui habitent en Dieu. 

Part. prés. empl. substantiv.

A totz los habitans et a las habitairitz. 

Tit. de 1265. DOAT, t. XCI, fol. 178. 

A tous les habitants et aux habitantes. 

Si 'l ve ni l'au ni es sos abitans.

R. Gaucelm de Beziers: Un sirventes. 

S'il le voit et l'entend et est son habitant (hôte). 

Part. pas.

Era adonc bons luecx e de gent abitatz, 

… ar es desamparatz. 

V. de S. Honorat.

Était alors bon lieu et de gens habité,... maintenant est abandonné. 

CAT. ESP. PORT. Habitar. IT. Abitare. (chap. Habitá: habito, habites, habite, habitem o habitam, habitéu o habitáu, habiten; habitat, habitats, habitada, habitades.)

2. Habitable, adj., lat. habitabilem, habitable.

No sera habitables, ans sera coma us desertz.

(chap. No sirá habitable, sino que sirá com un desert.)

Liv. de Sydrac, fol. 72.

Ne sera habitable, au contraire sera comme un désert.

De tota la terra habitabla. Eluc. de las propr., fol. 163.

(chap. De tota la terra habitable. En catalá barceloní de fa no mols añs encara se podíe sentí pronunsiá habitabla, en a, inclús “habitapla”)

De toute la terre habitable.

CAT. ESP. Habitable. PORT. Habitavel. IT. Abitabile. (chap. Habitable, habitables.)

3. Enhabitable, adj., lat. inhabitabilem, inhabitable.

Habitables et enhabitables.

(chap. Habitables e (y) inhabitables.)

Tit. de 1464. DOAT, t. CXXXIX, non paginé. 

Habitables et inhabitables.

CAT. ESP. Inhabitable. PORT. Inhabitavel. IT. Inabitabile. 

(chap. Inhabitable, inhabitables.)

4. Habitacio, Habitacion, s. f., lat. habitationem, habitation.

Luenh de la habitacion dels homes. V. et Vert., fol. 85.

(chap. Lluñ de la habitassió dels homens.)

Loin de l'habitation des hommes. 

Fig. Dieus ell meteys, que es habitacio dels vivens, so es dels sancts.

V. et Vert., fol. 58. 

Dieu lui-même, qui est habitation des vivants, c'est-à-dire des saints.

CAT. Habitació. ESP. Habitación. PORT. Habitação. IT. Abitazione. 

(chap. Habitassió, habitassions.)

5. Habitacle, Abitacle, s. m., lat. habitaculum, habitacle.

Dieus, tu que fist tan bel miracle,

Met me el tieu sant habitacle.

Folquet de Marseille: Senher Dieus. 

Dieu, toi qui fis si beau miracle, mets-moi en ton saint habitacle. 

Fig. Establist

Abitacle, e lo fesist

A Dieu de cel appareyllat.

Trad. d'un Évangile apocryphe.

Tu établis habitacle, et tu le fis préparé au Dieu du ciel.

ANC. FR. As ciex firent lor habitacles. Roman de la Rose, v. 5417. 

Se retire aux tombeaux, habitacle d'horreur. 

R. Garnier, trag. de Marc-Antoine, acte IV, sc. 1.

(chap. Habitácul, habitaculs; com la siguién.)

6. Habitacol, Abitacol, s. m., habitacle, demeure.

Elhs passero oltra, e vengro vays lur habitacol. Philomena.

Ils passèrent outre, et vinrent vers leur demeure. 

L' abitacols es generals 

La terra de totz animals.

Brev. d'amor, fol. 39. 

La terre est la demeure générale de tous les animaux. 

ESP. Habitáculo. IT. Abitacolo.

7. Habitatge, s. m., habitation, domicile.

Persona aqui aven habitatge.

Tit. de 1294. DOAT, t. XCVII, fol. 250.

Personne ayant là habitation.

IT. Abitazzio. (chap. Habitassió, habitassions; domissili, domissilis; puesto aon se habite, aon se viu; casa, cases, etc.)

8. Habitaire, Abitaire, Habitador, Abitador, s. m., lat. habitator, habitant.

Cascus abitaire de Monpeslier. Cartulaire de Montpellier, fol. 51.

(chap. Cada un dels habitans de Montpellier; cada habitán.)

Chaque habitant de Montpellier.

Donarem tantas de noblas possessios que totz los habitadors d'aqui poyran estar honradament. Philomena.

(chap. Donarem tantes nobles possessions que tots los habitans d'aquí podrán está honradamén - honorablemen.)

Nous donnerons tant de nobles possessions que tous les habitants de là pourront être honorablement.

A San Salvador et als abitadors de la gleisa de Biule. Titre de 1090.

(En chapurriau del añ 1090: 

A San Salvadó y als habitadós o habitans de la iglesia de Biule.)

A Saint-Sauveur et aux habitants de l'église de Biule.

Nat de la vila de Monpeslier et abitador d' aquella.

(chap. Naixcut a la vila de Montpellier y habitán d' aquella; natiu de.) 

Cartulaire de Montpellier, fol. 120.

Natif de la ville de Montpellier et habitant d'icelle. 

ANC. FR. Li sercles e li habiteour de lui.

Anc. trad. du Psaut., Ms. n° 1, ps. 23. 

La cité est bien lavée du sanc aus habiteurs. Joinville, p. 128.

Loing, loing habitateur des cavernes funèbres. 

La Boderie, Hymnes ecclésiastiques, fol. 259. 

Et d' Athénien esté fait habitateur de l'isle Andros.

G. Tory, Trad. des Politiques de Plutarque, fol. 37. 

CAT. ESP. PORT. Habitador. IT. Abitatore. (chap. Habitadó o habitán, habitadós o habitans, habitadora o habitán o habitanta, habitadores o habitantes.)

9. Habitairitz, Habitayris, s. f., lat. habitatrix, habitante. 

A totz los habitans et a las habitairitz. 

Tit. de 1265. DOAT, t. XCI, fol. 178. 

A tous les habitants et aux habitantes. 

Adject. Personas... habitayris d' alcuna vila. 

Rég. des états de Provence, de 1401. 

Personnes... habitantes de quelque ville. 

ESP. PORT. Habitadora. IT. Abitatrice. (chap. Habitadora o habitán o habitanta, habitadores o habitantes.)


Habituar, Abituar, v., lat. habituare, habituer. 

Part. pas. Sia en son cors abituada voluntat de viure castament.

V. et Vert., fol. 92.

Soit en son coeur volonté habituée de vivre chastement.

En parlant des ecclésiastiques attachés volontairement au service des paroisses.

Los autres capelas, confraires non cathedrals, collegials ni habituatz, se trobaran al forestol am surplis vestitz.

Tit. de 1535. DOAT, t. XC, fol. 211.

Les autres prêtres, confrères non cathédraux, collégiaux ni habitués, se trouveront au lutrin avec surplis revêtus. 

CAT. ESP. PORT. Habituar. IT. Abituare. (chap. Habituá, habituás: yo me habitúo, habitúes, habitúe, habituem o habituam, habituéu o habituáu, habitúen; habituat, habituats, habituada, habituades.)

2. Habitual, adj., lat. habitualis, habituel, usuel.

Aytal mot son dig habitual. Leys d'amors, fol. 50.

De tels mots sont dits habituels.

CAT. ESP. PORT. Habitual. IT. Abituale. (chap. Habitual, habituals.)

3. Habitut, s. f., article, l'une des parties du discours.

Quoras deu hom pauzar habitutz ni coras no.

Las dictios masculinas han lor proprias habitutz, e las femininas aquo meteysh.

Leys d'amors, fol. 59 et 58.

Quand on doit poser articles et quand non.

Les mots masculins ont leurs articles propres, et les féminins cela de même.

(chap. Artícul, articuls.)


Her, Hier, Er, Ier, adv., lat. heri, hier.

Reys Castellas, ges vostre pretz no col 

De melhurar, q' oi val pro mais que her.

Aimeri de Peguilain: Si com l' arbres. 

Roi Castillan, votre mérite ne glisse point d'améliorer, vu qu'aujourd'hui il vaut beaucoup plus qu'hier. 

Loc. Mais huey s' oblida aco d' hier.

(chap. Pero avui s' olvide aixó d' ahí.)  

Pierre d'Auvergne: De Dieu no us. 

Mais aujourd'hui s'oublie cela d' hier. 

Ieu l'am totz jornz, sempre mais hoi que er. 

Albertet: Atrestal val. Var. 

Je l'aime toujours, sans cesse plus aujourd'hui qu'hier.

Ier se det, et huey s' estrais.

Raimond de Miraval: Tals vai mon chan. 

Hier se donna, et aujourd'hui se retire. 

Adv. comp. L'autr'ier trobei la bergeira.

(chap. L'atre día vach trobá a la pastora.) 

G. Riquier: L'autr'ier trobei.

L'autre jour je trouvai la bergère.

L'autr'ier fuy en paradis. 

Le Moine de Montaudon: L'autr'ier. 

L'autre jour je fus en paradis.

Prép. comp. Si m'ai pessat des ier 

Qu' el fazes de tal razo. 

Giraud de Borneil: A penas sai. 

Ainsi j'ai pensé dès hier que je le fisse de tel motif. 

ANC. FR. Ne veil hui pas si jéuner

Comme ge fis er, par seint Jaque...

Je ne manjai très avant er. 

Roman du Renart, t. III, p. 91 et 131. 

L'autr'ier chevauchoie de lez Paris... 

Nous venions l'autr'ier de joer et de resver. 

Richard de Semilli. Ess. sur la Mus., t. II, p. 214 et 217. 

Ha! quand j'ouy l'autrehier, il me souvient. 

Si fort crier la corneille en un chesne. 

Clément Marot, t. III, p. 300. 

ANC. CAT. Yr. ESP. Ayer. IT. Ier, l' altrier. 

(chap. Ahí, ahir: lo día abans d' avui.)

2. Arser, adv., lat. herisero, hier soir.

Senher, vecvos Folquet que venc arser. 

Roman de Gerard de Rossillon, fol. 19. 

Seigneur, voici Folquet qui vint hier soir.

ANC. FR. Qui dort si forment que il samble qu'il fust ersoir yvres.

Rec. des hist. de Fr., t. III, p. 186. 

Le lingnages sainte Marie 

Est hui plus granz qu'il n'ere ersoir.

Fables et cont. anc., t. II, p. 296. 

Mes cosins dit que il estoit, 

Més ersoir mangier me voloit.

Roman du Renart, t. III, p. 139. 

IT. Iersera. (chap. Ahí de nit.)


Heregia, Eretgia, s. f., lat. haeresis, hérésie. 

Mans reys e mans apoestatz

A mes en heregia.

V. de S. Honorat. 

Maints rois et maintes puissances a mis en hérésie. 

Lai definet en eretgia, segon c'om ditz. 

V. d'Aimeri de Péguilain. 

Là il mourut en hérésie, selon qu'on dit. 

CAT. Heretgia. ESP. Heregia (herejía). PORT. Heregia, heresia. IT. Eresia.

(chap. Herejía, herejíes.)

2. Heretge, Heretje, Eretge, adj., lat. haereticus, hérétique.

N' Esquiva fo heretgua... N' Auda, la maire... e sa sor foro heretgas.

Tit. du XIIIe siècle. DOAT, t. XXXII, fol. 269.

Dame Esquiva fut hérétique... Dame Auda, la mère... et sa soeur furent hérétiques. 

Substantiv.

Diguas me, tu heretje, parl' ap me un petit. 

Izarn: Diguas me.

Dis-moi, toi hérétique, parle avec moi un peu.

Cum fan los heretges e los menescrezens que volon mezurar lur entendemen e lur razo a la mezura de la fe. V. et Vert., fol. 102.

Comme font les hérétiques et les mécréants qui veulent mesurer leur entendement et leur raison à la mesure de la foi.

Per que l' eretge son levat.

P. Vidal: A per pauc de chantar. 

C'est pourquoi les hérétiques sont élevés. 

ANC. FR. Que il promette et ferme par son serment... de mettre hors de son royaume les hereges. 

Reg. de la Chambre des Comptes. Carpentier, t. II, col. 740.

Lesquels enfin le trouvèrent hérèse et coulpable de mort.

Monstrelet, t. II, fol. 87. 

CAT. Heretge. ESP. (hereje) PORT. Herege. IT. Eretico. 

(chap. Hereje, herejes; qui practique la herejía, herejíes.)

3. Hereciarca, s. m., lat. haeresiarcha, hérésiarque.

Adjectiv. Girbert hereciarca o heretge.

Cat. dels apost. de Roma, fol. 146. 

Girbert hérésiarque ou hérétique. 

CAT. ESP. PORT. Heresiarca. IT. Eresiarca. (chap. Heressiarca, heressiarques.)

4. Heretgal, adj., hérétique. 

Opinio heretgal. L'Arbre de Batalhas, fol. 15.

Opinion hérétique.

(chap. Herétic, heretics, herética, herétiques.)


Heres, s. m., lat. haeres, héritier. 

Heres pot esser instituitz. Trad. du Code de Justinien, fol. 63. 

(chap. Lo heréu pot sé instituít.)

Héritier peut être institué.

Quar auran 

Heres sordeiors.

P. Cardinal: Aissi com hom. 

Car ils auront héritiers plus vils. 

CAT. Hereu. IT. Erede. (chap. Heréu, hereus, hereua, hereues. 

ESP. Heredero, herederos, heredera, herederas.)

2. Her, s. m., lat. haeres, hoir, héritier.

A tots sos hers et successors perpetualment et hereditablement.

Tit. du XIVe siècle. DOAT, t. VIII, fol. 217.

A tous ses hoirs et successeurs perpétuellement et héréditairement.

3. Heritador, s. m., héritier.

Que per t' amor nos facza heritadors celestials. Lo Payre eternal.

Que par ton amour il nous fasse héritiers célestes.

4. Heretier, Eretier, s. m., héritier. 

Esser heretiers de Dieu e de totz sos bes. 

Sobre totz sos bes lo establira heretier. V. et Vert., fol. 38.

Être héritier de Dieu et de tous ses biens. 

Il l'établira héritier sur tous ses biens.

Qu' elh nos cuelha en resplendor 

On li sieu sanhs son eretier.

Pierre d'Auvergne: De Dieu no us. 

Qu'il nous accueille dans la splendeur où les siens saints sont héritiers.

Fig. Filhs de Mort et heretiers de yfern. V. et Vert., fol. 39. 

Fils de Mort et héritiers d'enfer. 

ANC. CAT. Hereter. ESP. Heredero. PORT. Herdeiro. (chap. Heredé o heréu, heredés o hereus, heredera o hereua, herederes o hereues.)

5. Heretiera, Heretera, s. f., héritière. 

A ma universal heretiera. Tit. de 1278. Château de Capdenac.

A mon héritière universelle. 

Fig. Heretera de salvacio. Eluc. de las propr., fol. 13. 

Héritière de salut.

CAT. Hereva. ESP. Heredera. (chap. Heredera o hereua, herederes o hereues.)

6. Coheiritz, s. f., cohéritière. 

Procurairitz et coheiritz.

Tit. de 1275. DOAT, t. CXXIV, fol. 27. 

Procuratrice et cohéritière.

(chap. Coheredera o cohereua, coherederes o cohereues.)

7. Hereditari, adj., lat. haereditarius, héréditaire. 

Per drech hereditari.

(chap. Per dret hereditari.)

Eluc. de las propr., fol. 128. 

Par droit héréditaire.

Per causa hereditaria. Charte de Gréalou, p. 122. 

Pour chose héréditaire. 

Portion hereditaria.

Tit. de 1313. DOAT, t. XXXVIII, fol. 178. 

Portion héréditaire. 

CAT. Hereditari. ESP. PORT. Hereditario. IT. Ereditario.

(chap. Hereditari, hereditaris, hereditaria, hereditaries.)

8. Heritalmen, adv., héréditairement.

Corporalmen et heretalmen. Tit. du Périgord, de 1271.

Corporellement et héréditairement.

(chap. Corporalmen y hereditariamen.)

9. Heretablament, Heretablement, Hereditablement, adv., héréditairement.

Heretablament et a totz temps.

Tit. du XIVe siècle. Allou, Description de la Haute-Vienne, p. 244.

Héréditairement et à tous temps.

Heretablement et perpetualment.

A tots sos hers et successors perpetualment et hereditablement.

Tit. du XIVe siècle. DOAT, t. VIII, fol. 216 et 217.

Héréditairement et perpétuellement.

A tous ses hoirs et successeurs perpétuellement et héréditairement.

(chap. Hereditariamen.)

10. Heretat, s. f., lat. haereditatem, héritage, hérédité.

Aqui deu esser lo plag tengutz on es la heretatz.

Trad. du Code de Justinien, fol. 15. 

Là doit être tenu le plaid où est l'héritage.

Que puesc' a mon fort senhor 

Defendre mas heretatz.

Le Dauphin d'Auvergne: Reis. 

Que je puisse contre mon puissant seigneur défendre mes héritages. ANC. FR. Duist à els l' éréditet des genz.

Anc. trad. du Psaut. de Corbie, ps. 110.

CAT. Heretat. ESP. Heredad. PORT. Herdade. IT. Eredità, ereditate, ereditade. (chap. Heredat, heredats; patrimoni, patrimonis; possessió, possessions; feudo, feudos; finca, finques; mas, masos, etc.)

11. Heretatge, Heritatge, s. m., patrimoine, héritage, fief.

Per qu' a perdut pro de son heritatge.

Lanfranc Cigala: Estiers mon grat.

C'est pourquoi il a perdu assez de son patrimoine.

Sus en l' onrat heretatge

On son li sanctor.

R. Gaucelm de Beziers: Quascus planh.

En haut en l'honoré héritage où sont les saints.

Totz em heretiers dels gran heritatge del paradis. V. et Vert., fol. 56.

Nous sommes tous héritiers du grand héritage du paradis.

ANC. CAT. Eretatge, eritatge. ANC. ESP. Heredage. IT. Ereditaggio.

(chap. Patrimoni.)

12. Heretamen, Eretamen, s. m., héritage, hérédité.

Sitot non ai grans terras ni grans heretamens. 

Pierre de Corbiac: El nom de.

Quoique je n'ai grandes terres ni grands héritages.

Que laisses, apres sa vida,

Lo seu bel captenemen 

A son fill ab l' eretamen.

Olivier de la Mer: Ai! cal. 

Qu'il laissât, après sa vie, sa belle conduite à son fils avec l'hérédité.

Fes perdre aquel heretament. Hist. abr. de la Bible, fol. 2. 

Fit perdre cet héritage. 

ANC. CAT. Heretament, eretament. ANC. ESP. Heredamiento. 

(chap. Heredamén, heredamens.)

13. Heretar, v., hériter, recevoir un héritage, faire héritier. 

Per so qu' els bens del payre non pogues heretar. V. de S. Honorat.

Pour ce qu'il ne pût hériter des biens du père. 

Los benignes et aquells de bon ayre heretaran la terra. 

V. et Vert., fol. 58. 

Les doux et ceux débonnaires hériteront de la terre. 

Terras pot hom laissar

E son filh heretar,

Mas pretz non aura ja, 

Si de son cor non l' a.

Arnaud de Marueil: Rasos es. 

On peut laisser terres et faire héritier son fils, mais il n'aura jamais mérite, s'il ne l'a de son coeur.

- Doter, investir.

Cent cavayers vos ai vist heretar, 

E cent autres destruir' et issilhar.

Rambaud de Vaqueiras: Honrat marques. 

Cent cavaliers je vous ai vu doter, et cent autres détruire et exiler. 

Part. pas. Mil borzes e mil servidor

Que totz foran gent heretat, 

Si 'lh visques, e ric e honrat. 

Guillaume, Moine de Beziers: Quascus plor. 

Mille bourgeois et mille serviteurs qui tous seraient agréablement dotés, et puissants et honorés s'il vécût.

ANC. FR. Vous hérite de toute la terre du Béarn. Froissart, t. III, p. 28.

Sa fille à feme li dona 

Et de sa terre l' ireta.

Roman de Brut, t. 1, p. 130.

CAT. Heretar. ESP. Heredar. PORT. Herdar. IT. Eredare. 

(chap. Heredá: heredo, heredes, herede, heredem o heredam, heredéu o heredáu, hereden; heredat, heredats, heredada, heredades. Si yo tinguera una tía rica, cuántes coses heredaría.)

14. Dezeretaire, Dezeretador, s. m., ravisseur d'héritages, envahisseur d'héritages.

Ricx hom dezeretaire

Es piegers que autre laire.

P. Cardinal: Qui ve gran. 

Puissant homme envahisseur d'héritages est pire qu'autre larron.

Mals e fellons e dezeretadors.

P. Cardinal: Ges ieu. 

Méchants et félons et ravisseurs d'héritages.

(chap. Desheredadó, desheredadós, desheredadora, desheredadores.)

15. Deseret, s. m., exhérédation, dépouillement.

A totz degra de dolor lo cors fendre

Del deseret del fill sainta Maria.

G. Faidit: Cascus hom.

A tous devrait le coeur fendre de douleur à cause du dépouillement du fils de sainte Marie. 

Quar, si prezam leialtat ni valor, 

Son dezeret tenrem a dezonor.

Aimeri de Peguilain: Ara parra. 

Car, si nous prisons loyauté et valeur, nous tiendrons à déshonneur son exhérédation.

Ges non crei Frances, ses deman, 

Tengan lo deseret que fan 

A tort a mant baron presan. 

Bertrand de Born: Guerra e trebalh.

Point je ne crois que les Français, sans opposition, maintiennent le dépouillement qu'à tort ils font à maint baron distingué.

(chap. Desheredamén, desheredassió; despullamén, despulla.

ESP. Despojamiento, desheredación.)

16. Dezeretamen, s. m., dépouillement, exhérédation.

Nos quer qu'el dezeretamen 

Que ill faun Sarrazi felo, 

Lo seguam tug la dreita via.

Pierre d'Auvergne: Lo senher que. 

Il nous demande que, au dépouillement que lui font les Sarrasins félons, nous le suivions tous en la droite voie.

ANC. FR.

E Richart virent tornez à déséritement.

Ke Richart out torné à déséritement.

Roman de Rou, v. 3600 et 3671. 

Vous pourchaciez mon deshéritement.

Roman de Garin le Loherain, t. I, p. 125. 

CAT. Desheretament. ANC. ESP. Desheredamiento. 

(chap. Desheredamén, desheredassió; despullamén, despulla.)

17. Desheretar, Deseretar, Dezeretar, v., déshériter.

Deu los desheretar nomnadamen e deu dire la causa per que el los deshereta. Trad. du Code de Justinien, fol. 60.

Doit les déshériter nommément, et doit dire la cause pourquoi il les déshérite.

En cas que las ingratitutz non serian sufficiens a desheretar Anthoneta. Tit. de 1399. Justel, Hist. de la maison de Turenne, p. 134. 

En cas que les ingratitudes ne seraient pas suffisantes pour déshériter Antoinette.

- Dépouiller d'un héritage, déposséder.

Ans se laissen ses clam deseretar. 

Bertrand de Born: Un sirventes fatz. 

Mais se laissent déshériter sans réclamation. 

Ieu 'n sai de tals qu' amon dezeretar

Mais Crestias que Sarrazis fellos.

Pons de Capdueil: So qu' hom plus. 

J'en sais de tels qui aiment plus déposséder Chrétiens que Sarrasins félons. 

Fig. Ai! quant n'a deseretatz, 

Qu' eran tuit ric en s'amor! 

Folquet de Marseille: Si cum selh. 

Ah! combien elle en a déshérités, qui étaient tous riches en son amour!

Part. pas. 

Oms que deseretatz viu, guaire non val re.

Sordel: Planher vuelh. 

Homme qui vit déshérité, ne vaut guère rien. 

Fig. Caitius, desheretatz d'amor.

Gavaudan le Vieux: Crezens fis. 

Chétif, déshérité d'amour.

Islla de Lerins, que faras, 

Destrucha e desheretada 

De ta gloriosa maynada?

V. de S. Honorat. 

Île de Lérins, que feras-tu, détruite et déshéritée de ta glorieuse famille?

CAT. Desheretar. ESP. Desheredar. PORT. Desherdar. IT. Diseredare.

(chap. Desheredá: desheredo, desheredes, desherede, desheredem o desheredam, desheredéu o desheredáu, deshereden; desheredat, desheredats, desheredada, desheredades.)

18. Aderetar, v., faire héritier, léguer. 

Terras pot hom laissar, 

Son filh aderetar.

Arnaud de Marueil: Razos es. Var. 

On peut laisser terres, faire héritier son fils. 

ANC. FR. Douaires n' ahérite uns enfans en manière que li pères n'en puist faire sa volenté de son hiretage puis la mort de sa fame.

Cout. de Beauvoisis, p. 75.

martes, 5 de febrero de 2019

Benitachell, Ricart García Moya

http://ricartgarciamoya.com/wp-content/uploads/2019/02/Benitachell.pdf

Benitachell y els traureulls de la II República (Bafrá de Memoria Histórica en Alberti y Mª Teresa León)

No conec el motiu, pero Benitachell ix asobintet en el periódic Levante (digital), sempre en catalá, no valenciá. Feta rahonamenta, direm que no es lo mateix que't fasa chichines la Luftwaffe de Richthofen (els apellits acabats en thofen sempre mos impacten) en Guernica que, per eixemple, dirte García Gilabert y espicharla poquet a poquet a piteus de bufats socialistes y comunistes republicans en Benitachell. Abans d'aumplirmos de sanc en l'asunt, ¿se escriu Benitachell o Benitatxell?
El topónim es Poble Nou de Benitachell en valenciá, encá que'l fascisme expansioniste catalá asoles permitix Benitatxell, reglot del Institut d'Estudis Catalans per l'any 1920. El segón component de Benitachell sugerix étim mosárap (¿del thauchell o thauch documentat per Simonet?). El topónim tingué variants migevals, p.e.: “alcahreas vocatas benitegell et alabiar” (ACA, Doc. Jaume II, Reg. 215, any 1317, f. 212 r.); pero, en valenciá modern, s'impongué la dels nostresyayos, que mosatros coneguérem desde chiquets: “les Alqueríes de Benitachell y Abiar” (Archiu Mun. de Denia, Nugat 336, any 1662); “Benitachell” (Dicc. Geográfico, Barcelona, 1831, p.874), “Benitachell” (Cavanilles: Obs. IV, 1797, p.222). Els greixers de la llengua, la AVLL del PP y Tripartit, els diaris Levante e Información, La Veu, etc., asoles permitixen el nom en catalá, y si fa falta entarquimen lo que diu la documentació; aixina, per eixemple, un porcatí catalaniste escriu: “any 1277, Pere III d’Aragó... i Rafal de Benimarxó” (Diari La Veu del País Valencià, 11 /08/ 2018, p.1); alterant l'original, que diu: "Petrus. Dei gratia Rex... et Rafal de Benimarchó” (ACA, Reg. 40, f. 10, 11 d'agost any 1277). ¿Es donen cónter? Ahón n'hiavía una -ch- en el pergamí, fa el cámbit per -x-. Lo interesant es que alguns etimólecs creuen que`l compost Benitachell es metafóric en significat de 'cadena de montanyes', ahon el pinna de la toponimia mosárap valenciana (Corominas: Onomasticon) donaría l'arabisat Beni-, y ahon també tindríem metátesis de c en t en el vocable catella > *tacella anterior a l'aplegá dels moros, perqué doná temps al cámbit mosárap de ce en ch. La paraula catella es diminutiu, en lletí clásic, de catena ('cadena'), d'ahí la metáfora de cadena de montanyes, com el fr. chaine. Qui s'acoste a Benitachell vorá en claritat lo que pareix una aserp de montanyes, y el mateix poble oferix ondulacions Benitachell está tan indefens davant dels catalanistes com els seus antepasats que, una esprá de 1936, patiren l'aplegá dels republicans que mataríen al Pare Plácido. En el lletrero del mercat, ahon fica el dit el terroriste blaver, observem que'l valenciá peixcatería, viu desde l'orige de la llengua, ha segut reemplasat per el cat. peixateria. Li he preguntat a la sinyora Bolufer García (parenta lluntá del asesinat Plácit García) cóm es díu en Benitachell y, sinse ductaro, respón que peixcatería. N'hian més destarifos: aixina, xarcuteria, en cónter del valenciá charcutería (per víndrer del fr. charcuterie); servei y no el val. servici; y el cat. esmorzar, en val. almorsar, armosar. Día Corominas: "el catalán esmorzar es forma reciente, sin documentación anterior al s.XIX, antes se dijo almorzar, como sigue diciéndose en el Reino de Valencia" (DCECH,1, p.204): “almorsar” (Llull: Blanquerna, traduit al valenciá, any 1521); “lo millor será donarli armosar” (Casinos, A.: ¡Ara eres mare!, 1926) 2 y costeres que semblen entortillats asbaraors de fira. Recorda Corominas que “els benitachells es el nom que's dona hui a una partida del Puig de la Llorença, situá damunt del poble” (Onomasticon), y recorda que la Serra de Benicadell (Penna Cadiella del 'Poema del Cid') ve de pinna. En fi, lo que tenim clar es que'ls catalanistes prohibixen la grafía Benitachell del valenciá modern, la de mosatros. Deixant la llandosa etimología, anem a temps més próxims, sinse olvidarmos dels polítics que dugueren la catalanisació y als podemites, com l'últim alcalde del PP en Benitachell, el sinyor Cardona: «Juan Cardona dimitió tras ser detenido por un supuesto cohecho en la recalificación de unos terrenos. Cardona, detenido en 2008 por exigirle a un promotor 50.000 euros a cambio de mantener urbanizables unos terrenos».¿Qué ha fet esta gent pera deféndrer nostra historia y llengua? Res de profit y, tots, aumplirse bolchaques. Ara, aspayet, nemon a l'atra Memoria Histórica en sanc, gavinets y tallaetes (no aconsellable pera mingotrelles fetillers) Hui, cubert de núbols, dihuit de giner de 2019 estic en Benitachell. M'esgole en el baret del mercat y prenc un nugolet pera'l fret. En tristea y mig adormit pense que'n 1895, entre boires del Nort, naixqué en Barzdorf un nano al que batejaren Wolfram von Richthofen y, el mateix any en Benitachell, aubrí els ulls Micalet García Gilabert. El primer manaría la Legión Cóndor que'l 26 d'abril de 1937 desbudellá Guernica; el segón, ple de celsitut, li doná per la Teología y ferse franciscá baix el nom de Plácit García Gilabert. De 1930 a 1933 estigué estudiant Dret en Roma, tornant al Reine cuan la Generalitat de Companys y l'ugetiste Largo Caballero adobaven el Colp d'Estat de 1934. Encabant, al aplegar el botafoc del 18 de joliol de 1936, Plácit treballava en el colege d'Ontinyent, pero els morts a mans de progresistes li feren buscar amparo1 en casa del seu germá Vicent. En Benitachell no s'acamina sinse topetarte en els garcíes, parents de prop o llunt del Pare Plásido García, que aixina li diuen respetuosament. Quí heu sap tot d'ell es la sinyora Josefa García Buigues, neboda carnal de García Gilabert. La dona te 102 anys, “pero menja com un lleó”, me diu atre membre de la familia, Mª Carmen Bolufer García, que treballa en l'Ajuntament de Benitachell, ahon l'alcalde Miquel García també es parent lluntá del asesinat. La sinyora Bolufer me conta que “la caseta” de Vicent, ahon estigué amagat tres díes cuan botá d'Ontinyent, hui te “atra fachá y, ademés, viuen estrangers”. Y la del atre germá Gabriel García en les afores de Benitachell, ahon agarraren a Plácit els progresistes, la tiraren y hui n'hian chalets. Es llandós contar 1 AMPARAR del lletí anteparāre, hui prohibit per els colaboracionistes: “amparar... no obstant l’ampara” (Roig: Spill, 1460) “eres del christiá refugi, amparo” (Timoneda: Aucto de la Yglesia, 1575) “amparo y protecció de V. M.” (Ginart: Reportori dels Furs, 1608, f. 3); “sería gran amparo pera resistir a les imposicions” (BRAH, ms. Dietari Porcar, 9 set. 1612); “troben en vos lo amparo” (Matheu y Sanç: A la V. de la Sapiencia, 1642); “unich amparo en tots los perills” (Archiu Mun. Oriola, Leg. 984, Generalitat, 1649), etc. En l'Etat Mija ixqué l'arcaisme y corrupció emparar , comú al castellá “emparar” (Cid, Berceo). Detinguda el 9 de noembre de 1936 sinse cárrec algú, com a Plácit de Benitachell, la relligiosa Arriola Uranga y atres 22 adoratrius les dugueren a la checa de Fomento o Bellas Artes de Madrit. Els progresistes de la image, tranquils com si anaren de torrá de chulles, es mostren satisfets per la captura, pensant en lo que'ls faríen en nom del Progrés eixa mateixa esprá en la checa, cuan les torturaren en corrents eléctriques, les colpejaren y, a les més jovenetes de les 23, les violaren. Mig desfetes, en camió les dugueren a la nit prop del madrileny cementeri de l'Almudena, ahon practicaren el deport del tir al blanc en elles. Eren 23, y hui asoles tenim recort pera 'Las Trece Rosas' (acte paregut e incalificable fet per l'atre bando, el franquiste). 3 l'adolívit del 1936 y quirdar l'atenció dels actuals mijos de comunicació sectaris, que no reconeixen esta vergonya y una y atra vegá repetixen el sembenet: '¡Que a García Lorca el mataren els faches!' (y es veritat), '¡que torna l'extrema dreta!', '¡que arderéis como en el 36', 'que la derecha tiene que pedir perdón per lo del 36', 'que volem més millons pera desoterrar morts'. La veritat, no entenc este primitivisme per una grapallá de pols; yo, una vegá mort y fet sendra, ya he dit que me poden tirar al fem o per el forat del comú. Nemon, no queda atre remey, a fer Memoria Histórica d'una aldacrá del progresisme republicá en 1936 que, per cert, els que's declaren hui rames del mateix abre —PSOE, EU, Compromís, Podemos, etc.—, sempre es fan els desentenguts y no demanen perdó a les families de les víctimes. Sinse l'hábit de flare, l'indefens García Gilabert deixava la caseta de Gabriel y se'n anava un bascós 21 de joliol a buscar resguart en la del atre germá, Vicent García, en les afores. No n'hiavía seguritat dins dels huit carrerons de Benitachell, perqué'l Comité de Defensa aulorava y moscava a quí teníen que detíndrer y ferli l'anatomía2 . Astó heu conta u dels creaors d'este invent, l'anarquiste García Oliver, atre que volá d'Espanya en 1939 y faltá en Méxic en 1980: “Se les inculcaba una escala de valores que pueden conducir al éxito en las luchas urbanas: extrema reserva, puntualidad en las citas, observancia rígida de las consignas, mantenimiento del espíritu de equipo dentro del cuadro, agilidad de movimientos, evitar la parálisis del quietismo como el atrincheramiento en una barriada” (Garcia Oliver, J. : El eco de los pasos, Ruedo Ibérico, 1978). Lo terrorífic es que podíen fer “pesquisas armadas en las casas particulares para detener emboscados, curas, derechistas y quintacolumnistas”. Aixina ampomaren a Plácit García Gilabert. Els del Comité de Benitachell, per alló de «evitar la parálisis del quietismo como el atrincheramiento en una barriada», moscaren als comités de les vehínes Denia y Eixavia. A les tres de l'esprá del día de la Mare de Deu d'Agost, un 15 d'agost de festa llaica, aparegué en Benitachell un camió en borrachos progresistes armats en fusils y ametrallaores. Buscaren a Plácit en la caseta de Gabriel y, al no trobarlo, enfilaren a la del germá Vicent en els bancals. La festa dels fardachos progresistes tingué prémit. Capturaren a Plácit sinse problemes, al oferirse ell mateix als guardians del orde republicá. Una vegá dins del camió, els eufórics milicians l'eixhibiren com si fora una rabosa per tot Benitachell. ¿Quí estava raere dels Comités de Defensa y Drets Humans de la II República? En tota Espanya feen lo mateix. Detingut el presunt quintacolumniste, emboscat, retor, flare, sinyoret amariconat, empresari o germaneta de la Caritat, el ficaven en una cachapera aislat, sinse més testics que'ls camarades encarregats de furgar dasta'ls nyitols als engabiats. El detingut els durava poquet, apenes 10 hores, mentres es divertíen fenli barbaritats que mosatros no podem ni ansomiar. El cas de Plácit García Gilabert es calcat d'atres com el de la monja Manuela Arriola Uranga, naixcuda en Ondárroa, de les Adoratrius de Madrit. La relligiosa, junt a atres 22 germanes, havíen fugit del convent y malvivíen en un piset en Madrit. Moscat el Comité, el 9 de noembre de 1936 les detingueren cuatre despitralats sádics y les dugueren a la nomená checa de Fomento o Bellas Artes, ahon feren sesió de tortures abans de que per la nit les cosiren a trons. Les salvajaes asoles paraven cuan alguna anava a terra sinse sentit. Aixina que, si la joveneta patía desmay, li aplicaven inyecció de clorur de cocaína3 y, torná en sí, seguíen els colps, violacions, etc. Mig mortes, a la nit les carregaren en un camió dasta prop del cementeri de l'Almudena, ahon s'acabá la festa en els tirs a les moribundes en nom del Progrés, l'Esquerra, la Llibertat y la República. Crec que ni Ana Belén ni Rosana Pastor (la Boris Karloff valenciana) han fet cap de película d'este episodi gloriós del Socialisme y Comunisme humanitari. 2 ANATOMÍA Abanda del semantisme centífic, també era matar y fer péntols a un ser humá o animal: “y si se acostava algún llop... l´acorava, y de ell fea anatomía” (Bellver, Blay: Chiste de un llenyeter, 1854) 3 El clorur de cocaína, desde'l us en campanyes militars per 1880, es donava als malferits pera donarlis curta euforia. 4 La Memoria Histórica fa olvit dels intelectuals que apoyaren4 el suplici d'inocents, fora en Benitachell o en la infernal checa de Bellas Artes de Madrit, ahon el poeta Rafael Alberti y la seua sinyora María Teresa León (sempre pistola al sint) anaven asobint pera tastar l'espectácul de chillits, navaixaes y colps. Poc abans de faltar, en 90 anys y saratá en metástasis, l'antiu espía del Mossad Antonio Hortelano fea recort de cóm anava Alberti a eixa checa pera vórer als detinguts en “la cabina”, habitació estreta en parets de llanda electrificá (Crón. Diario El Mundo, 3 d'agost 2009). No n'hia millor testic que la mateixa María Teresa León, camarada de llit del mariner en terra Rafael Alberti. Ella mateixa recordava anécdotes en André Malraux y sa dona Clara en el Madrit de 1936, ahon “se había divertido mucho”; y en eixe ambient de confiansa deixa entrevórer cóm es fea la selección de víctimes pera les cheques: “Un imbécil es un imbécil. En Madrid había muchos imbéciles, emboscados, rabiosos, inquietos. Creían que no había orden público porque no lo tenían en su mano y era el pueblo el que había impuesto su manera de matar pulgas. Sí, los guardias nuevos miraban sospechósamente a los señoritos que fingían ir desastrados y malvestidos. A la lengua se veía el disfraz”. Dona detallista, donava informació de sa vestimenta: “Rafael lleva puesto su uniforme. Yo, el mío” (León, María Teresa: Memoria de la melancolía, p.131), y del seu gust: “me atraían los anarquistas” (ib. p.157). En realitat, l'uniforme era el famós “mono azul” en correache, pistoles y cartucheres, que donaría nom a la revista homónima d'Alberti y Teresa: “en medio de este va y viene nació El Mono Azul... No sé si fue José Bergamín quien la bautizó. De mono azul vestían nuestras primeras Milicias Populares y nuestro Mono Azul estaba destinado a los combatientes” (ib. p.285). Els dos teníen “siempre preparada la pistola” (ib. p.364), y donaven pavor cuan senyalaven a qui els pareixía facha. El perill a la mort y “al paseo” ficava cabell vert al ciutadá. Si te parlava una miliciana en pistola y “mono azul” teníes que dirli “camarada”, perque si li díes “señora” te portaven a la checa. Teresa León conta que va vórer a un home en “una gallina atada a una cuerda. ¿Se la comerá en la Navidad? Sí, sí, y se le atragantó el 'señora' para evitar que lo descubrieran”. Teresa anava sempre “en unos amigos”, camarades de la F.A.I., dedicats a la captura de víctimes pera la checa: “Otro día, uno de esos que no saben vivir sin amos, tropezó conmigo. Estas golfas, dijo al mirar mi casi uniforme: ¿Qué has dicho? Murmuró no sé qué de muertos y por si acaso aludía a mis antepasados lo agarré del brazo con rabia. Soltó una palabrota. Se enfrentó, pero yo llamé a unos amigos míos y concluyó detenido”. 4 Del lletí podium > *appodiare, ixqueren els antius fr. appuyer e it. appoggiare; este últim, supost orige del verp valenciá: “mes pera apoyar asó” (En obsequi desl Voluntaris Honrats del Reyne, 1794, p. 5) Teresa León y Alberti, cervells al servici d'El Mono Azul, trataven de nugar al fasciste en el homosexual, pensant que desdoraven un poc més als que teníen que matar: “Barbilanpiño, curvirrostro,/ amariconado y necio, / rizándose las pestañas con humaredas de incienso,/ entra el pollito fascista en la iglesia y el convento” (El Mono Azul, jueves 17 de septiembre 1936, p.5 ) 5 Els chequistes Alberti y María Teresa León, fels amics de Stalin Que u siga poeta o escritor admirable, com eren els susodits Teresa y Alberti, no es motiu pera omplir d'apegaloses taranyines retóriques que amaguen el fosc pasat. A mi, per eixemple, m'agrá el Marqués de Sade com a lliterat, y em repugna sa moralitat y comportament. Dit astó, recordem que Tereseta y Alberti nadaven com peix en sequiola en l'ambient de Guerra Civil en Madrit. Ya en 1936 teníen un palau neogótic, incautat als Spínola, pera viurer: “Nosotros ya vivíamos, entonces, en el palacio de la calle Marqués del Duero” (ib.p.109). No mos sorprén l'alegría y felicitat del poétic matrimoni entre tortures y morts: “¿Sois felices?¿Sois felices?... Sí, era una maravilla de fraternidad, de comunicación (…) Días felices. ¿Felices los días de guerra?... los mejores de nuestra vida” (ib.p.380). No'ls afectava els chillits de la checa de Bellas Artes de Madrit, ahon anava la parella en asiduitat. La checa, paraula d'orige rus, va ser una institució creá en 1917 per el soviétic Dzerzhinski. El seu fi era torturar para obtindrer informació y lliquidar al oponent ideológic. Els chequistes, sinse llímit llegal, teníen poder absolut sobre'l ciutadá. Este mecanisme terrorífic, que tant agradava a Teresa y Alberti, s'implantá per la II República en 1936, en els mateixos privilegis que'n la URSS. Teresa y Alberti anaven per Madrit en un gran vehícul confiscat y en un chofer, mascle de casoleta, que si fea falta li ficava l'ambut per lo ample a cuansevol fasciste virtual que li senyalara Teresa. En l'otony del 36 es deixá cáurer per Madrit el noveliste André Malraux, alluntat d'aquell viage frustrat a Indochina pera furtar obres d'art en Camboya. Este aventurer, que aplegaría a ministre d'Interior en el gobern de De Gaulle, era íntim de Teresa y Alberti. Tots junts, en el coche incautat, 'apatrullando la ciudad' (com diría Torrente) practicaven la caça y peixca per intuició del fasciste, ¡emboscat en mig del carrer!. La delicá Teresa, sempre en pistoló, no ductava en unflar a bascollaes conilleres al presunt quintacolumniste, mentres Alberti y Malraux es baquechaven a riurer. A modo d'eixemple tenim el cas d'aquell “hombrecito” al que Teresa li agarrá tirria y, clar, havía que desferse d'ell: “vi de nuevo al hombrecito que fingía esperar a la novia. No pude contenerme: ¿Qué haces aquí?... y antes de que tuviera tiempo de echar a correr, ya lo había yo agarrado violentamente y, ayudada por el gran amigo Antonio que nos servía de chófer, metido a puñetazos en el coche. Malraux, muy divertido, se sentó junto a Rafael y todos nos dirigimos a la Dirección de Seguridad.” Raere de les galtaes de caixó, el grupo5 de Teresa, Alberti, Antonio y Malraux dugueren detingut al “hombrecito” a mans dels seus camarades chequistes. La paranoia de Teresa li fea vórer emboscats y espíes en cada replaseta y cantó de Madrit, persones que mereixían anar “a paseo”, es dir, a eliminarles físicament. Just 'A paseo' es el títul eufemístic d'una columna que'n agost de 1936 5 Grup En valenciá tenim el polisémic grup, també equivalent al cast. difteria; mentres que grupo ve del it. gruppo : “cada grupo per sa banda” (Thous, Maximiliá: ¡Esquirols!, 1914, p.8) Teresa visitá dos vegaes a Stalin y va vórer que fea un seguiment apasionat de la Guerra Civil. En la “Sala de Consejos del Kremlin” n'hiavia “un plano de Madrid. Los puntos de colores eran batallas, bombardeos” (León, Mª Teresa: Memoria de la melancolía, p.179). En la segón vesita estigueren charrant en ell més dos hores: “Y seguimos hablando. ¿Cuánto tiempo? El coronel, cuando salimos, nos dijo: han estado ustedes con el camarada Stalin dos horas y cuarto, nadie estuvo más”. Eren temps de la Gran Porga dels anys 30, que'ls rusos li díen de 'Gran Terror', en millars de torturats y morts. Era el mateix sistema implantat per la II República, l'aplicat a Plácit García Gilabert, les Adoratrius de Madrit o les enfermeres de Pola de Somiedo. Foren, segons día Teresa: “los años más felices de mi vida”. 6 escomensá Alberti en El Mono Azul. Sinse més objetiu que enredrar y ficar odi, la mateixa publicació enfilaba dasta a les dones que, en galgea y mortes de fam, es prostituien per els cantons de Madrit per un moset de formache o rosegons de pa. Teníen que ser detingudes “con disposiciones de tipo policiaco” y ferles desaparéixer: “casi todas las Venus del amor mecánico comulgan con las derechas. El espionaje fascista recluta entre ellas sus servidores más fieles”. Aixina que “sí que pueden hacernos daño. Conque... ¡vayamos enseguida a la reclusión!” (El Mono Azul, 18 de noviembre 1936, p.2). La reclusió d'eixes 'espíes' famolenques era la checa y, de regal, “el paseo”. La musa de estes locures histériques era la parella enguiscaora María Teresa León y Alberti, sempre esburgant quí s'amagava tras portes, finestres o balcons. Día Teresa: “¡Oigan! ¡Miren! ¡Escuchen! ¡No hablen! La Quinta Columna está escuchando... La Quinta Columna abría despacio los balcones cuando venteaban los aviones franquistas; luego, los cerraba hasta el próximo bombardeo”. També, plena d'inyor y tendrea, Teresa reviscolava moments creatius en Alberti y uns gotets de vinarra: “esas canciones las escribíamos Rafael y yo, sentados en un bar de las Cuatro Calles”. Eren lletres pera animar a detíndrer més gent pera la checa: “Las chicas del barrio sur, en el puente de Toledo, detienen a los cobardes, que en Madrid no cabe el miedo” Estaven en 1936 y, optimistes, pensaven que'n Nadal ya haurían guanyat la Guerra Civil. Sinse por a cap de represalia, els asesinats y tortures aufegaven la llibertat del ciutadá. Alberti es fea el pacifiste en romansos y dibuixets de 'La Paloma de la Paz', pero lo que volíen era exterminar a cualsevol que mostrara tibiea ideológica, imitant al seu admirat Stalin. Ells no hagueren fet cap d'amnistía de guanyar als nacionals. Mostra d'eixes intencions es atra de “esas canciones” escrites en el bar de “Las Cuatro Calles” per Teresa y Alberti: Los cuatro generales que se han alzado, antes de Nochebuena serán ahorcados.” En eixe ambient pavorós recordava Teresa que's trobá per els carrers de Madrit a un escabellonat Juan Ramón Jiménez, que's lliurá de la mort de milacre: “Nos encontramos una mañana con Juan Ramón Jiménez. Venía sonriente, algo bueno parecía haberle pasado. Y así era. Nos contó: Figúrese, Alberti, que acabo de salvar mi vida. Pues me sucedió que llegaron a mi casa unos de la F.A.I. empeñados en que yo era un tal Ramón Jiménez al que iban buscando. Afortunadamente uno de ellos me metió un dedo en la boca y aclaró: Pues este no es, porque este no lleva dentadura postiza.¡Qué bien comprendimos lo sonriente que iba Juan Ramón, llevando entre los labios su documento de identidad intransferible!¡Ah, qué Madrid éste!. Sí, era el Madrid chispeante donde la broma, la canción y el desplante reaparecían.” Molta broma si te lliuraves dels chicots de la F.A.I., o si eres dels companyers de Teresa y Alberti, que teníen la paella del mánec. Entre detenció, denuncies y calbots al sospechós aplegá Nadal del 1936 y, ¿ahón feren festa y s'engoliren el tito la parella de comunistes? En un puesto digne del proletariat: “¡Navidad en el palacio del Pardo! María Teresa, hay que organizar una buena fiesta. ¿Y el vino? Vendrá del Palacio Real. ¿Y los pavos? Tendrás pavos. Quiero, además de ramas de pino, laurel para los generales y olivo para la paz. Todo, todo. El general Kleber6 sonrió al entrar aquella noche. Platos con coronas reales. Cristales resplandecientes”. Eren, día la proletaria María Teresa León, “los días más felices de mi vida”; pero les víctimes que'l poétic matrimoni havía dut a la checa seguíen patint y morint, també en Nadal. 6 General Kleber Malnom del rumá Manfred Zalmánovich Stern, enviat per Stalin com a espía en el cor republicá. 7 Les enfermeres7 nuetets que serviren de distracció a camarades llibertaries L'actuació d'ugetistes, llibertaries, milicians de la F.A.I, etc., era la mateixa en tot el territori republicá, encá que l'escasea de mijos pera torturar dasta'l llímit —com en la checa de Fomento o Bellas Artes de Madrit—, no'ls impedía als progresistes dels poblets com Benitachell o Pola de Somiedo disfrutar8 d'una esprá de gorcha y mamela entre esguitons de sanc y fel bosá dels que torturaven artesanalment. Eixemple de cóm cumplíen els Drets Humans es la captura y fusilament de tres enfermeres de la Creu Roja. Les armes que les incautaren eren cotompel, aspirines y alcohol. Tot es va fer segons el canon: les agarraren el 27 d'octubre de 1936, estigueren l'espra y nit en mans dels progresistes y, al matí, sinse robes, unes milicianes voluntaries juaren en elles abans d'enviarles a pasejar eternament. En este cas, al ser testic tot el poble de Pola de Somiedo, es reconstruí punt per punt el calvari d'eixes enfermeres d'Acció Católica, delit suficient pera'l castic de tortura, violació y mort. Retallant lo escabrós, aixina actuaren els republicans: “apresadas el 27 de octubre de 1936, las tres enfermeras Pilar Gullón Yturriaga (25 años), Octavia Iglesias (41) y Olga Pérez (23) pasaron la noche en cautiverio en Pola de Somiedo con los milicianos, que abusaron reiteradamente de ellas. Dicen los testigos que un carro utilizado para actividades rurales, cuyo tipo de eje produce un chirrido característico, fue utilizado para apagar los gritos. En la mañana del 28, unas milicianas se ofrecieron para fusilar a las prisioneras, las despojaron de toda su ropa y, al mediodía, las voluntarias las fusilaron, enteramente desnudas, en un prado. Las milicianas se repartieron las prendas de las muertas. Las ejecutoras de los disparos fueron Evangelina Arienza, Dolores Sierra, y Emilia Gómez. que hicieron escarnio de los cuerpos durante gran parte de la tarde, hasta que a la noche fueron sepultadas en la fosa común que cavaron dos prisioneros, también ejecutados luego”. Els testimonis apunten a u que'l díen 'El Patas', cap d'una columna republicana: “El Patas les dijo a los milicianos que hicieran con ellas lo que quisieran durante la noche. Éstos las violaron y su jefe incluso hizo circular por el pueblo un carro de bueyes para que el chirrido de sus ejes hiciera más difícil oir los gritos de las tres enfermeras”. Qui millor descriu lo de les tres enfermeres va ser Manuel Gullón (Alfa y Omega ,12 de abril 2007, p. 5), terrorífic relat que s'anfronta al mon idílic que d'Asturies cantaven Teresa y Alberti en sa fulla pera'ls republicans per eixes feches: “en la 7 Enfermer En valenciá tenim enfermer, enfermería, no els catalans infermer, infermería: “Lo dit enfermer conservant aquelles robes" (DCVB, doc. any 1417); “enfermer” (Exulve: Praeclarae artis, 1643). En la traducció al valenciá del Blanquerna, el cat. Bonllabi escriu la veu correcta: “entrá en la enfermeria” (Blanquerna, 1521, f. 31); “morí... en la enfermería de Sant Francés” (BRAH, ms. Dietari Porcar, 23 de dehembre 1613). 8 Disfrutar Cultisme derivat del lletí fructus > frut > dis-frut > disfrutar. El catalanisme heu sustituix per els arcaismes y catalans vius ‘fruir, gaudir’: “poderles disfrutar” (Rahonament... el consell que tingueren el Tio Cosme Nespla de Benifaraig, 1797) En tota Espanya republicana feen lo mateix. Raere de la tortura y lliquidació del quintacolumniste, sinyoret amariconat, flares, retors, adoratrius o enfermeres, els progresistes republicans agarrafunyaven lo que podíen dels morts. Si eren, com en la image, casulles o roba que no'ls aprofitava, feen el mardanot abans de cremarla. Conta Teresa que “al subir una escalera, me encontré con unos compañeros anarquistas, luciendo unos graciosos sombreros de señora, cargando con un piano y gritando: ¡Ahora somos los condes! Calles sin condes llenas de gracia madrileña” (León. Mª. T.: Memorias de la melancolia, p.291) Tot era d'ells y, com a mostra, el palau amaitinat a uns marquesos, ahon vivíen Teresa y Alberti “los mejores años de su vida”. 8 noble tierra asturiana nacía una nueva dignidad del hombre” (El Mono Azul, 8 de octubre 1936, p.2), ¡Qué diríen les tres enfermeres que, despullaes de sa roba, serviren de joguets abans de morir el 27 del mateix mes y any en Asturies!. Lo que li feren a Plácit de Benitachell estava programat en La Traca En part tenim narrat l'inici d'este vergonyós episodi del que may parlarán poc ni molt les televisions del Régim pancatalanaziste (m'agrá el neollogisme de la RACV de Voro) que tot el día mos unfla el cap en la dichosa Catalunya o els morts de la Memoria Histórica, la dels republicans de Teresa León y Rafael Alberti. Segons la gent que va vórer els aconteiximents del 15 d'agost de 1936, un camió en milicians aplegá a les tres de l'esprá a Benitachell pera buscar al flare Plácit García Gilabert. Detingut sinse problemes, García estigué unes hores en mans del Comite que, segons actuaven els companyers de Teresa y Alberti en les cheques de Madrit, el deixaren fet macoca9 . Els durá poc y, a la matiná, aparegué tirat entre carts y tallacames al costat del camí a Denia. Arreplegat per familiars, la descripció del cadáver feta per el mege titular de Benitachell Vicent Noguera y el seu practicant, día que'l mort era “joven y corpulento, estaba mutilado: le faltaban los órganos sexuales y una oreja; y además presentaba señales punzantes en nalgas y otras partes, como producidas por aguja saquera”. Clar, els del Comité no tenían a ma més instruments que garranchons, gavinets y ahulles saqueres, res que vórer en la “cabina” de la checa de Bellas Artes que deleitá a Alberti y Teresa. Segons es deduix del análisis post mortem, els progresistes el dugueren al camp y li digueren que correguera, que estava lliure; pero, ¿cóm anava a córrer Plácit, transit a colps y sinse ull? El benefactors de la Humanitat teníen un mig: les ahulles saqueres de 15 cm pera puncharli per raere, d'ahí10 les “señales punzantes en nalgas” que'l dotor Vicent va vórer. L'home, sinse sanc y sinse ull, acaminá pocs metros. No donava espectácul pera'l tir al facha, aixina que'ls bochins l'ompliren de plom y el deixaren tirat entre'ls cudols; no obstant, al ser molt mascles els correlligionaris d'Alberti y Teresa León, reviscolaren una costum prou arrailá: tallar testículos al moribunt, siga bou o un home. A mitants del sigle XX encá es fea en els animals: “en Tordesillas se soltaba un toro por las calles, siendo excitado por la gente hasta que desemboca en la Vega del Duero, donde le esperan caballistas y hombres a pie armados con picas. Una vez es herido de muerte, el total de los participantes acaba con él, aunque es derecho del que lo hiere de muerte primero arrancarle los testículos al toro, y mostrarlo orgulloso en el extremo de su lanza” (Peris, J.: Demonio, religión y sociedad, CSIC, 2002, p.81) Aixina com es públic els noms de les republicanes que deixaren en porreta a les enfermeres en Pola de Somiedo y les feren de tot, en Benitachell no's coneix el nom del que tallá hous11 y orelles al 9 Macoca El sustantiu macoca, en valenciá, es figa pansida y clevillá. 10 En valenciá modern n’hian cuatre graus de llocalisació díctica: ací, ahí, allí y, pera lo més llunt, allá (no es lo mateix ‘ací damunt’ que ‘ahí en la caira’): “tin per ací, tin per allá, ahí n va hu” (Galiana: Rond. 1768, p. 68) “lo portaren al Palau del Bisbe e allí l´aposentaren” (Dietari de Jeroni Soria, 20 setembre 1521) 11 En valenciá modern du h- epentética pera trencar l´anfibología homográfica en el verp oír (tu ous, ell ou): “¿Ous caquechar les gallines?” (Gadea: Ensisam, 1891); “se ou la veu de...” (Badenes, V.: Tápat sego,1945); “qui els regale una moneta (de Pascua). que tinga dos hous” (Ros, C.: Romanç del jochs, c.1730) Com a menjar fonamental del poble, ix en tonaes dels chiquets: 'Hous en el ponehor / bastonaes al sinyor retor./ El mateix 19 de joliol de 1936, al sendemá del inici de la Guerra Civil, els republicans ya anaven per iglesies y convents fent lo mateix que'n 1931 y 1934. Aixina, buscant joyes amagaes del convent de Saleses tragueren momies de les criptes, demostrant cóm guardaven la dignitat del ser humá. 9 teólec Plácit. Y dic orelles, en plural, perque'l auxiliar del mege deixá cáurer en el procés: “no recuerdo con exactitud si también le faltaba la otra oreja”. En realitat, els comunistes y socialistes feen lo que'ls dictaven els intelectuals que, raere de la maquineta d'escriurer, sugeríen qué fer al oponent ideológic: “con la gente de sotana... cortarles el instrumento para que no delincan con el sexo. A las monjas... meterles un cartucho de dinamita en el ojete y pegarle fuego... a los curas y a los frailes les castraba de raíz. A las monjas se lo cosía a punto de estera con una aguja saquera...” (La Traca, 14 de octubre 1936, p.7) “como toros de lidia. Al más gordo cortarle los perniles y mandarlos al Papa de Roma y a los demás cortarles los testículos” (La Traca, 21 de octubre 1936, p.3) “sacarles los ojos para que no vieran” (La Traca, 11 de noviembre 1936, p.6). Aixina li feren al teólec Plácit de Benitachell, y may vorem películes o series pera que'l poble sapia qué pasá en eixe bando republicá progresiste, humanitari y cult, ahon Teresa y Alberti fomentaven la tortura y mort. Hui n'hian cantitat de carrers que duen noms d'esta seráfica parella, dasta coleges com el CEIPMaría Teresa León, que disimulen cóm volía als chiquets l'amiga dels anarquistes. Aixina, en narració curta descriu la conversació d'un pare en el fill de sis anys, al que li dona una sistella en pólvora pera atentats: «Padre, ¿dónde están los traidores? Se entendían.—Padre, ¿han traído las cestas? A los seis años se puede llevar una cesta al brazo sin que nadie sospeche...—Mira, esto para los traidores que no dejan vivir a los hombres del trabajo. Y cogió la cabeza del niño con la mano negra de pólvora y le refregó los hociquitos tibios. —Huele. Pólvora» (León, María Teresa: El Mono Azul, 24 de septiembre 1936, p.6) Hui n'hian coleges d'EGB y carrers que duen el nom d'esta sinyora. En Alacant, per eixemple, el carrer del germá pilot de Franco es ara carrer María Teresa León. Dihuit de giner de 2019, aplegue a casa. Vaig a tastar arrós negre en sepionets y, ademés, abaecho o bacallar en oli, sucat en pa de Benimagrell. Ensenc la televisió del Régim y, en tobor, bote del Ferreras al Laberinto catalá de la Griso y, ¡quína casualitat!, caic en la 2 de TVE y me ix lo de sempre: els que fan empatabobos en la mort de García Lorca. Justet raere del cap del blaver tenim el puesto ahon els traureulls republicans perseguiren a punchaes d'ahulla saquera al Pare Plácit. A l'esquerra, de testic, el magestuós Mongó 12 valenciá (sempre sinse la -t- dels catalanistes y les seues víctimes). El paisage es pot vórer desde la replaseta de la iglesia de Benitachell, ahon descansa el teólec que la Memoria Histórica ha deixat abanda. Per cert, aquella tabolla d'imbésils catalanistes que escupiren y espentaren en mig de carrer a una indefensa Cristina Seguí, ¿qué hagueren fet en ella si tingueren el poder d'un Comite del 36 y una checa de la II República?

Hous en la pallisa,
/ bastonaes a la tía Lloísa.
/ Hous en l'almari,/
bastonaes al sinyor vicari./
Hous en el clot, /
bastonaes a Chimot./
Hous en l'andana,/
bastonaes a la tía Tana...':

“els hous sempre els ven prou cars” (Coloqui nou... a una fornera, a una sastresa..., c.1740) 12 Mongó “derivado del latín Mons Iovis, daría Mongó” (Diago, 1600); “Mongó significaría Mons Agón” (Escolano, 1608); “a pres en la montanya del Mongó” (Llib. Albará, 322, any 1622); “ermites en Mongó” (Esteve, f. Pere: Storia del Sant Sepulcre, c. 1645) “la montanya de Mongó” (BV. ms. 255, Planells: Vida de fr. Pere, 1760); “En Denia empiezan las raíces del Mongó” (Cavanilles: Obs. 1797) “de Mongó vullch ser la dóna” (Barreda, M.: La cara de Mongó, 1873, p. 8); “Els Collons del Mongó” (Corominas: DECLLC, v. 2, p. 834). Als colaboracionistes catalaners els sindona res la documentació; lo que volen es poder y dinés.

miércoles, 27 de septiembre de 2023

Chapitre VII. Adverbes, prépositions, conjonctions.

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Chapitre VII.

Adverbes, prépositions, conjonctions.

Je range sous un même titre les adverbes, les prépositions, les conjonctions, et les autres semblables éléments du discours; parce que, selon le rang qu' ils occupent dans la phrase, leurs fonctions changent quelquefois: ainsi certains adverbes, suivis du QUE, deviennent conjonctions; et certaines prépositions le deviennent aussi, lorsqu' elles sont immédiatement suivies du même QUE; et enfin les prépositions employées d' une manière absolue, et sans soumettre un nom quelconque à leur régime, deviennent adverbes.

Ces rapports intimes ont été cause de l' embarras que plusieurs grammairiens ont éprouvé, quand ils ont voulu classer ces divers éléments du discours.

Dans la langue latine, POST était tour-à-tour adverbe et préposition, et, suivi de QUAM, devenait conjonction. (1)

(1) Adverbe. "De Capitone POST viderimus." Cic. pro Sex. Rosc. Amer. 30.

Préposition. Postque brevem rescribe moram. Ovidio, De Arte amandi, III v. 473.

Conjonction. Tum, POSTQUAM ad te venit, mensis agitur hic jam septimus.

TER. Hec. act. III, sc. 3, v. 34.

Dans la langue romane, et dans les autres langues de l' Europe latine, il est quelquefois des mots qui offrent les mêmes variétés.

Je parlerai d' abord des adverbes; Ensuite, des prépositions; Et enfin, des conjonctions, négations, interjections; etc. A mesure que les adverbes, les prépositions et conjonctions passèrent de la langue latine dans la nouvelle langue, ils reçurent souvent l' adjonction d' une préposition romane, et notamment des prépositions A, DE, EN.

Ainsi d' INTUS vint INTZ, INS, auquel fut ajouté DE, qui produisit DE INS, (: dins) dans; et même, par reduplication de la préposition DE, fut formé DEDINS, dedans.

De SATIS latin vint SATZ, qui reçut l' A, et forma ASATZ, assez.

VERSUS latin fit d' abord VERS, vers, et les prépositions DE et EN, jointes à VERS roman, produisirent DEVERS, ENVERS.

En parcourant la nomenclature des principaux adverbes, des principales prépositions, et des conjonctions, qu'on ne soit pas surpris de trouver ce rapprochement de différentes prépositions.

Avant de présenter les tableaux des principaux adverbes, des principales prépositions, et des diverses conjonctions, je crois utile de placer ici des détails qui expliqueront la manière dont la langue romane a formé ces nombreux éléments du discours, en les dérivant presque toujours de la langue latine.

Ces détails auront un double avantage d' une part, ils présenteront l' origine et la dérivation du mot qui en sera l' objet; et de l' autre, ils montreront le rapport des adverbes, prépositions, ou conjonctions, qui ont une origine ou une dérivation commune.

Voici des observations successives sur les principaux adverbes, sur les principales prépositions, et sur les différentes conjonctions.

AB, A, avec.

Cette préposition AB se trouve dans les plus anciens monuments de la langue romane:

"AB Ludher nul plaid nunquam prindrai. (1)" Serment de 842.

Ella AB Boeci parlet ta dolzament. (2) Poëme sur Boece.

AB vos estay on qu' ieu esteia;

La nueg e 'l jorn AB vos domneya. (3)

Arnaud de Marueil: Ab vos estay.

Quelquefois cette préposition quitte le B, selon les manuscrits ou la prononciation locale; alors A seul signifie avec:

Que 'l meiller es, et ab mais de beutat,

D' autra domna; e es A dreit jujatz. (4) 

Pistoleta: Sens e sabers.


(1) "Avec Lothaire nul traité ne oncques prendrai.”

(2) Elle avec Boece parla tant doucement.

(3) Avec vous suis où que je sois;

La nuit et le jour avec vous courtise.

(4) Que la meilleure est, et avec plus de beauté,

Qu' autre dame; et est avec droit jugé.

Qu' estat ai en tal marrimen,

Qu' A pauc no m' an mort li sospir. (1)

Gaucelm Faidit: Ab chantar.

Que s' il maire 'l sabia, batria l' A bastos. (2)

Sordel: Planher vuelh.

Lai a Melhau, on solia tener,

Qu' el coms li tolh ses dreg, e A gran tort,

E Marcelha li tolh a gran soan. (3) 

Bertrand de Born: Un sirventes farai.

Qu' assatz val mais morir, al mon semblan, 

Que toz temps viure A pena et A afan. (4) 

Peyrols: Pois entremis me.

A penas sai dir oc ni no. (5)

Pons de Capdueil: S' anc fis ni dis.

A penas sai dir oc ni no. Pons de Capdueil: S' anc fis ni dis.

On trouve parfois AM, AMB, pour AB:

“AM l' ajutori de Dieu.” (6) Philomena, fol. 35.

“Et aqui atrobero lor fraire Thomas et l' arsevesque Turpi AMB elhs.” (7)

Philomena, fol. 1.

Il serait difficile d' expliquer d' où vint cette préposition.

(1) Qu' été ai en tel chagrin,

Qu' avec peu ne m' ont tué les soupirs.

(2) Que si la mère le savait, battrait le avec bâton.

(3) Là à Millau, où accoutumait tenir,

Que le comte lui ôte sans droit, et avec grand tort,

Et Marseille lui ôte avec grand mépris.

(4) Qu' assez vaut plus mourir, à mon avis,

Que tous temps vivre avec peine et avec chagrin.

(5) Avec peines sais dire oui et non.

(6) “Avec l' aide de Dieu.”

(7) “Et là trouvèrent leur frère Thomas et l' archevêque Turpin avec eux.”

  

Ce qu'on peut dire de plus satisfaisant, c'est que d' AB, racine d' HABERE, la langue romane a fait une préposition qui désigne la possession, l' adhérence, la manière, etc., et qui a l' effet d' approprier, de joindre, d' identifier les objets, etc.

AD, A, à.

La préposition latine passa dans la langue romane, et conserva son acception primitive.

Elle retint quelquefois le D, lorsqu' elle était placée au-devant des mots qui commençaient par une voyelle; et elle quitta toujours le D au-devant des mots qui commençaient par une consonne.

DES, DESSE, dès, depuis; DESSE QUE, DES QUE, dès que; ADES, DESE, à-présent, toujours; NEIS, même; ANCEIS, au contraire.

DE IPSO latin, sous-entendu TEMPORE, forma DES roman.

AD IPSUM, sous-entendu TEMPUS, forma ADES. (1:  Ce changement d' IPS en EPS ou ES est très ordinaire; s' il fallait en donner des preuves matérielles, je citerais ces vers du poëme sur Boece, où EPS est évidemment le même que IPS:

EPS li satan son en so mandamen...

Ne EPS li omne qui sun ultra la mar...

E la mors a EPSAMENT mala fe. 

Poeme sur Boece.

(*: Même les satans sont en son obéissance...

Ni même les hommes qui sont outre la mer...

Et la mort a mêmement mauvaise foi.)  


DES fut préposition, DESSE QUE, DES QUE, furent conjonction,

ADES, DESSE, adverbes.

Préposition.

DES lo temps Rollan,

Ni lai denan,

Non fo anc tan pros

Ni tan guerreian. (1) 

Bertrand de Born: Mon chant.

Conjonction.

DESSE QUE serem vengut. (2, 3)

Bertrand de Born: Lo coms m' a.

El temps del premier paire,

DES QUE cregron las gens. (4) 

Arnaud de Marueil: Rasos es.

Adverbe.

S' ieu sabi' aver guizardo

De chanso, si la fazia,

ADES la comensaria

Cunheta de mots e de so. (5) Berenger de Palasol: S' ieu sabia.

(1) Depuis le temps de Rolland

Ni là auparavant,

Ne fut jamais tant preux

Ni tant guerroyant.

(2) Le manuscrit du Vatican 3794 porte, au lieu de DESSE QUE,

le synonyme QUANT:

Quant aqui serem vengut.

(3) Dès que serons venus.

(4) Au temps du premier père,

Dès que augmentèrent les gens.

(5) Si je savais avoir guerdon

De chanson, si la faisais,

A l' instant la commencerais

Gentille de mots et de son.


Adverbe.

Sos homs plevitz e juratz 

Serai ADES, s' a leis platz. (1) 

Alphonse II, Roi D' Aragon: Per mantas.

Que tan no vauc, ni sai ni lai, 

C' ADES no m tenha en son fre. (2) 

Bernard de Ventadour: En cossirier.

E en enfer n' anec DECE

Per nos salvar, vera merce. (3)

Pierre d' Auvergne: Lo senher.

E qui 'l bon rei Richar, que vol qu' eu chan, 

Blasmet per so que no paset DESE,

Ar l' en desmen, si que chascus o ve

C' areires trais per miels saillir enan. (4)

Folquet de Marseille: Sitot me soi.

L' adverbe NEIS, même, vint du latin IN IPSO:

Per que no vuelh un dia 

Viure desconortatz, 

Que, NEIS quan soi iratz,

Ieu chant e m' asolatz. (5)

Arnaud de Marueil: Ses joi non es.

(1) Son homme cautionné et juré

Serai toujours, si à elle plaît.

(2) Que tant ne vais, ni çà ni là,

Que toujours ne me tienne en son frein.

(3) Et en enfer en alla à l' instant,

Pour nous sauver, vraie merci.

(4) Et qui le bon roi Richard, qui veut que je chante,

Blâma pour ce que ne passa à l' instant,

Maintenant l' en dément, si que chacun cela voit

Qu' arrière tira pour mieux saillir avant.

(5) Pour quoi ne veux un jour

Vivre découragé,

Vû que, même quand suis triste,

Je chante et me récrée.


Mas so que tolre no m podetz,

Tolre no m podetz que no us am,

NEYS s' ieu e vos o volriam,

Que no m' o cossentri' amors. (1) 

Arnaud de Marueil: Totas bonas.



ANCEIS, d' ANTE IPSUM.

Conjonction.

Senz no fo ges, ANCEIS fo granz foldatz. (2)

Folquet de Marseille: Per Deu amor.

ANCEIS m' es esquiv' e fera,

On eu plus li clam merce. (3)

Sail de Scola: De bon gran.


DONC, ADONC, DONCX, ADONCS, DONCAS, ADONCAS, alors, donc.

Du TUNC latin vint dunc, et la langue romane y ajouta parfois la préposition AD, A.

On trouve, dans la basse latinité, AD TUNC (4), locution qui pourrait bien être un effet de la langue romane sur la langue latine elle-même:

Adv. E DUNC apel la mort ta dolzament. (5) Poeme sur Boece.

(1) Mais ce que ôter ne me pouvez,

Oter ne me pouvez que ne vous aime,

Même si moi et vous le voudrions,

Vû que ne me le consentirait amour. 

(2) Sens ne fut aucunement, au contraire fut grande folie.

(3) Au contraire m' est rétive et farouche,

Où je plus lui crie merci.

(4) AD TUNC nos... AD TUNC IPSE. Plaid de 842. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. I, p. 99.

(5) Et alors il appelle la mort tant doucement.


ADONCA era un lengage entre tota la gent. (1)

La Nobla Leyçon. 

Adverbe.

E quan lo bosc reverdeya, 

Nais fresca e vertz la fuelha;

ADONCAS ieu reverdey 

De joi, e florisc cum suelh. (2)

Geoffroi Rudel: Lanquan lo temps.

Lanquan vei los arbres florir, 

Et aug lo rossignol chantar, 

ADONC se deu ben alegrar 

Qui bon' amor saup chausir. (3)

Bernard de Ventadour: Quan la vertz.

Cant ieu la cug ades trair per amia,

ADONCX la truep pus salvatg' e peior;

DONCX ben es fols totz hom qu' en lor se fia. (4)

Bernard de Ventadour: En amor truep.

(1) Alors était même langage entre toute la gent.

(2) Et quand le bois reverdit,

Naît fraîche et verte la feuille;

Alors je reverdis

De joie, et fleuris comme sureau.

(3) Lorsque vois les arbres fleurir,

Et ouis le rossignol chanter,

Alors se doit bien réjouir

Qui bonne amour sut choisir.

(4) Quand je la crois présentement entraîner pour amie;

Alors la trouve plus sauvage et pire;

Donc bien est fol tout homme qui en elles se fie.

 

On voit, dans l' exemple précédent, que DONC est conjonction, et sert à l' argumentation, de même que OR venant d' ORA, qui signifie alors, à l' heure, comme DONC:

Conjonction.

Razon e mandamen

Ai, de leys on m' aten,

De far gaia chanso;

DONCX, pos ilh m' en somo,

Ben coven derenan

Qu' ieu m' alegr' en chantan. (1)

Gaucelm Faidit: Razon.


ALHORS, AILHORS, ailleurs.

Cet adverbe vint du latin ALIORSUM: (2)

Ma forsa d' amor m rete

Que no m laissa virar ALHORS. (3) 

Arnaud de Marueil: Ab pauc. 

Perdre no m pot per so qu' ieu am AILLORS...

C' ai fach semblan qu' AILHORS m' era giratz. (4)

Arnaud de Marueil: Aissi com selh qu' a.

(1) Raison et mandement

Ai, de celle où m' adresse,

De faire gaie chanson;

Donc, puisqu' elle m' en semond,

Bien convient dorénavant

Que je me réjouisse en chantant.

(2) "Et si a proposito suo ALIORSUM digressi fuerint, per abbatem Anianensis monasterii corrigantur.” Titre de 819. Pr. de l' Hist. du Languedoc, t. I, col. 52.

(3) Mais force d' amour me retient

Qui ne me laisse tourner ailleurs.

(4) Perdre ne me peut pour ce que j' aime ailleurs...

Qu' ai fait semblant qu' ailleurs m' étais tourné.


ALQUES, quelquefois, parfois, aucunement.

Cet adverbe roman vint vraisemblablement d' Aliquoties.

Pero si m sui ALQUES forsatz. (1)

Bernard de Ventadour: Estat ai dos.

E si n' ai estat ALQUES lens,

No m' en deu hom ochaizonar. (2)

Berenger de Palasol: S' ieu sabi' aver.


AMON, DAMON, au haut, du haut; AVAL, DAVAL, à bas, en bas.

Ces adverbes paraissent formés de MONTEM, VALLEM, (a + munt, amunt, damunt) avec les prépositions A ou DE:

E la cortina se parti

El temple, DAVAL tro AMON. (3)

La Passio de Jhesu Crist.

Tornon so qu' es DAMON desotz. (4) (: sotz, sota, desus, sus, suso)

Pierre d' Auvergne: Cui bon vers.

Tro que n' aia mes te AVAL. (5) Roman de Jaufre.

E vai corren DAMON DAVAL. (6) Roman de Jaufre. 

(1) Pour ce si me suis aucunes fois forcé.

(2) Et si en ai été quelquefois lent,

Non m' en doit on accuser.

(3) Et le voile se fendit

Au temple, d' en bas jusqu' en haut.

(4) Tournent ce qui est au haut dessous.

(5) Jusqu' à ce que en aie mis toi à bas.

(6) Et va courant du haut en bas.


ANT, ANS, ANZ, ABANZ, DAVAN, DEVAN, avant, devant; ENAN, DENAN, ADENANT, avant, devant; ANTAN, avant l' année, jadis; DERENAN, DESERENAN, dorénavant; ANS QUE, avant que; ANS, ANZ, AINZ, au contraire, mais, ains.

Ces adverbes, prépositions et conjonctions viennent d' ANTE, combiné avec d' autres prépositions et adverbes. 

Adv. D' aquesta hora en ANT.” (1) Titre de 1122. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, col. 422. 

Autra ley d' ayci ENANT no devon plus aver. (2)

La Nobla Leyçon.

E torn atras, quand cug anar ENAN. (3)

Gaucelm Faidit: Maintas sazos.

Que lozenger e trizador

Portes' un corn el fron DENAN. (4)

Bernard de Ventadour: No m meraveilla.

“D' aquesta hora ADENANT.” (5) Titre de 1059. Pr. de l' Hist. du Languedoc, t. II, col. 230.


ANS est quelquefois adverbe de comparaison, et alors il est suivi du QUE ou du DE:

Qu' ANZ nos pregaran que nos lor. (6)

Bernard de Ventadour: Amicx Bernartz.

(1) “De cette heure en avant.”

(2) Autre loi d' ici en avant ne doivent plus avoir.

(3) Et tourne arrière, quand crois aller en avant.

(4) Que médisants et tricheurs

Portassent une corne au front au devant.

(5) “De cette heure en avant.”

(6) Qu' avant nous prieraient que nous elles.


ANTAN, d' ANTE ANNUM, signifia auparavant, jadis: (N. E. antaño)

Mas eras crey so qu' ANTAN no crezia. (1)

Arnaud de Marueil: Anc m' es tan be.

Lo mals d' amor qu' avi' ANTAN. (2)

Pierre Raimond de Toulouse: Enquera eu vei.


DERENAN, DESERENAN, venant de DE HORA IN ANTEA, DE IPSA HORA IN ANTEA, signifièrent dorénavant, désormais.

Per qu' eu vir DESERENAN. (3)

Gaucelm Faidit: Ges fora.

Préposition. Qui fan, per fol' entendensa, 

ANS del peccat, penedensa. (4)

Folquet de Marseille: Greu feira.

Vai, Papiol, e no sias lens,

A Trasinhac on sias ANS la festa. (5)

Bertrand de Born: Non estarai.

DAVAN so vis nulz om no s pot celar. (6) Poëme sur Boece.

Glorios Dieus, per ta merce,

Dressa ta cara DEVAN me. (7)

Folquet de Marseille: Senher Dieu.

(1) Mais ores crois ce que jadis ne croyais.

(2) Le mal d' amour qu' avais jadis.

(3) Pour que je tourne dorénavant.

(4) Qui font, par folle idée,

Avant du péché, pénitence.

(5) Va, Papiol, et ne sois lent,

A Trasinhac où sois avant la fête.

(6) Devant son visage nul homme ne se peut celer.

(7) Glorieux Dieu, par ta merci,

Lève ta face devant moi.


Sos homs plevitz e juratz

Serai ades, s' a leis platz,

DAVAN totz autres senhors. (1)

Alphonse II, Roi D' Aragon: Per mantas.

Qui vi anc mais penedensa

Faire DENAN lo peccat? (2)

Bernard de Ventadour: Lo temps vai.


ANS, suivi du QUE, est conjonction, et signifie avant que.

Conjonction. 

Si N' Alazais

Me pregava tot an, seria lassa

ANS QUE m' agues conquist per aymador. (3) 

Bernard de Ventadour: En amor truep. 

ABANS QUE il blanc puoi sion vert. (4)

Pierre d' Auvergne: Abans que.

“ENANS QUE tiresso areyre los cavals.” (5) Philomena, fol. 115.

Quelquefois il a le sens de plutôt:

Qu' ENANS voill que pres mi tenguatz,

Domna, que si m deliuravatz. (6)

Berenger de Palasol: Aissi com hom.

(1) Son homme cautionné et juré

Serai toujours, si à elle plaît,

Préférablement à tous autres seigneurs. 

(2) Qui vit oncques mais pénitence

Faire avant le péché?

(3) Si dame Alazais

Me priait tout an, serait lasse

Avant que m' eût conquis pour amant.

(4) Avant que les blancs sommets soient verds.

(5) "Avant que tirassent arrière les chevaux.” 

(6) Que plutôt veux que pris me teniez, 

Dame, que si me délivriez.


Le QUE est quelquefois sous-entendu.

Ordinairement ANS, conjonction, et non suivi du QUE, signifie au contraire, mais, ains:

Qu' ieu res no vei, ni sai on so;

ANS prenc lo mal e lais lo bo. (1) 

Folquet de Marseille: Senher Dieu.

Mas aisso non es ardimentz,

AINTZ es follia e non sentz. (2)

Roman de Jaufre.


AREIRE, DEREER, TRAS, ATRAS, DETRAS, arrière, derrière.

Ce fut en modifiant RETRO latin, et en y joignant les prépositions DE et A, que la langue romane forma DEREER et AREIRE.

Le même retro, ou TRANS latin, a pu fournir TRAS, ATRAS, DETRAS.

Adv.

C' an mes DERER so qu' anava denan. (3)

Hugues Brunel: Pois lo dreich.

Molt fort blasmava Boecis sos amigs

Qui lui laudaven DEREER euz dias antix. (4) Poeme sur Boece.

(1) Que je rien ne vois, ni sais où suis;

Mais prends le mauvais et laisse le bon.

(2) Mais ceci n' est hardiesse,

Ains est folie et non sens.

(3) Que ont mis derrière ce qui allait devant.

(4) Beaucoup fort blâmait Boece ses amis

Qui le louaient derrière aux jours anciens.


Adverbe.

Mi mandas AREIRE tornar. (1) 

Roman de Jaufre. 

E torn ATRAS, quan cug anar enan. (2)

Gaucelm Faidit: Mantas sazos.

E una femna ven DETRAS. (3)

Roman de Jaufre.

Préposition.

E es se TRAS un pilar mes,

E estet aqui apilatz. (4)

Roman de Jaufre.

Et ab aitant us nas issi

Qui estava TRAS un boison. (5)

Roman de Jaufre.


ASATZ, ASSATZ, beaucoup, assez; PRO, PRON, prou, assez.

De SATIS latin, auquel fut jointe la préposition A, vint l' adverbe ASATZ; il prend quelquefois la particule DE après lui.

Que tan son nostras terras luenh;

ASSATZ y a pas e camis. (6)

Geoffroi Rudel: Lanquan li jorn.

E membres li qu' ASSATZ quier qui s complanh. (7)

Peyrols: D' un bon vers.

(1) Me mandes arrière tourner.

(2) Et tourne arrière, quand crois aller en avant.

(3) Et une femme vient derrière.

(4) Et est soi derrière un pilier mis,

Et resta là appuyé.

(5) Et à l' instant un nain sortit

Qui était derrière un buisson.

(6) Vû que tant sont nos terres loin;

Assez y a pas et chemins.

(7) Et souvînt lui qu' assez demande qui se plaint.  


Comte d' Urgel, ASSATZ avetz formen,

E sivada, e bos castels, ab tors. (1)

Bertrand de Born: Un sirventes farai.

Pueis an ASATZ gabat e ris. (2)

Roman de Jaufre.

Lo nostre reys ASSATZ a de poder. (3)

Bertrand de Born: Un sirventes farai.


PRON, PRO eut la même acception. Il prit aussi quelquefois le DE après lui:

E aprenetz autre mestier,

Que aquest avetz PRON tengut. (4)

Roman de Jaufre.

Quar on plus la lauzaria,

Del laus sol qu' en remaria,

Cent domnas ne aurian PRO. (5)

Berenguer de Palasol: S' ieu sabi' aver.


Del papa sai que dara largamen

PRON del pardon, e pauc de son argen. (6)

(N. E. chap. Del Papa sé que dará o donará llargamen

prou de perdó - perdons, y poc de son argén : plata : dinés)

Bertrand d' Alamanon: D' un sirventes.

(1) Comte d' Urgel, assez avez froment

Et avoine, et bons châteaux, avec tours. 

(2) Après qu' ont assez raillé et ri.

(3) Le notre roi assez a de pouvoir.

(4) Et apprenez autre métier,

Vû que celui-là avez assez tenu.

(5) Car où plus la louerais,

De l' éloge seul qui en resterait,

Cent dames en auraient assez.

(6) Du pape sais qu' il donnera largement

Assez d' indulgences, et peu de son argent.


S' ieu trobes plazer a vendre,

E agues PRON de paiar,

Ben mi porion reprendre,

S' ieu non l' anes acatar. (1) 

Barthelemi Zorgi: S' ieu trobes.


CONTRA, ENCONTRA, contre, à l' opposite, envers, à l' encontre, en comparaison.

Ja no m' aia cor felon ni salvatge,

Ni CONTRA mi malvatz conselhs no creia. (2) 

Bernard de Ventadour: Quan vei la flor. 


Com la flors qu' om retrai

Que totas horas vai

CONTRA 'l solelh viran. (3)

Peyrols: D' un sonet vau.

Si vol que m lays de lieys, tuelha m lo sen,

E 'l cor e 'ls huelhs; e pueys partirai m' en,

Si puesc; si no, fassa n' ilh son veiaire,

Qu' ENCONTRA lieis non ai forsa ni genh. (4) 

Gaucelm Faidit: Mas la bella.

(1) Si je trouvasse plaisir à vendre,

Et eusse assez de payer,

Bien me pourraient reprendre,

Si je ne l' allasse acheter.

(2) Jamais ne m' ait coeur félon ni sauvage,

Et contre moi mauvais conseil ne croie.

(3) Comme la fleur qu'on rapporte

Qui toutes heures va

Contre le soleil tournant.

(4) Si veut que me laisse d' elle, ôte moi le sens,

Et le coeur et les yeux; et puis séparerai m' en,

Si peux; si non, fasse en elle son semblant,

Vû que envers elle n' ai force ni adresse.

 

Qu' issamen trembli de paor

Com fai la fuelha CONTRA 'l ven. (1)

Bernard de Ventadour: Non es meraveilla.

Si tot li dol e 'l plur e 'l marimen... 

Fosson esems, sembleran tut leugier 

CONTRA la mort del jove rei Engles. (2) 

Bertrand de Born: Si tut li dol.

E vi dejos un albespi,

ENCONTRA 'l prim rai del solelh. (3)

Gavaudan le Vieux: L' autre dia.

Ja mos chantars no m' er honors

ENCONTRA 'l gran joi qu' ai conques. (4)

Bernard de Ventadour: Ja mos chantars.


CUM, COM, CO, SI COM, EISSI COM, EN AISSI COM, COSSI,

comme, comment, de même que, ainsi comme.

Ces adverbes et conjonctions furent, selon leurs différentes acceptions, dérivés des mots latins CUM, QUOМODO, et prirent quelquefois SI, AISSI, EN AISSI romans.

Qu' er amors m' a forjujaz, no sai COM. (5)

Perdigon: Tot temps ai.

(1) Qu' également tremble de peur

Comme fait la feuille contre le vent.

(2) Si tous les deuils et les pleurs et les tristesses...

Fussent ensemble, sembleraient tous légers

En comparaison de la mort du vaillant roi anglais.

(3) Et vis en bas une aubépine,

A l' encontre du premier rayon du soleil.

(4) Jamais mon chanter ne me sera honneur

En comparaison de la grande joie qu' ai conquise.

(5) Qu' à-présent amour m' a condamné, ne sais comment.


Me mostra qu' ieu cossir

QUOM de lieys me sovenga. (1) 

Arnaud de Marueil: La cortesia.

Quan vostra beutat remire

Fresca CUM rosa en mai. (2)

Rambaud de Vaqueiras: Bella domna.

Que vos e mi 'n fesetz per totz lausar,

Vos com senher, e mi com bacalar. (3) 

Rambaud de Vaqueiras: Honrat marques.

Dona, loncx temps a qu' ieu cossir

Co us disses o us fezes dir

Mon pessamen e mon coratge. (4)

Arnaud de Marueil: Dona genser.

CUM ausam donc aquesta mort atendre? (5)

Gaucelm Faidit: Cascus hom deu.

Al segle mostrarai

COSSI s deu captener

Qui vol bon laus aver. (6)

Arnaud de Marueil: Rasos es. 

(1) Me montre que je considère

Comme d' elle me souvienne.

(2) Quand votre beauté admire

Fraîche comme rose en mai.

(3) Que vous et moi en fites par tous louer,

Vous comme seigneur, et moi comme bachelier.

(4) Dame, long-temps a que je considère

Comment vous disse ou vous fisse dire

Ma pensée et mon desir.

(5) Comment osons donc cette mort attendre?

(6) Au siècle montrerai

Comment se doit gouverner

Qui veut bonne louange avoir.

“SI COM in isto pergamen es scrit et om legir i o pod.” (1) 

Acte de 1053. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, col. 224.

AISSI col peis an en l' aigua lor vida. (2)

Arnaud de Marueil: Aissi col peis.


DE, de.

La préposition latine devint préposition romane, et eut différentes acceptions; elle exprima la propriété, la manière, etc.

E fezetz la terr', e 'l tro,

E tot quant es ni anc fo,

D' un sol seing, e 'l sol, e 'l cel. (3)

Pierre d' Auvergne: Dieus vera vida.


EN, E, dans, en.

D' IN, préposition latine, furent formés EN, E romans, qui conservèrent la signification primitive.

L' N n' est supprimé que parfois et devant les consonnes: 

Dona, que EN bon pretz s' entend,

Deu ben pausar s' entendensa

EN un pro cavalier valen. (4)

Comtesse de Die: Ab joi.

No cuid qu' E Roma om de so saber fos. (5) Poëme sur Boece.

(1) "Comme en ce parchemin est écrit et on lire y le peut."

(2) Ainsi comme les poissons ont en l' eau leur vie.

(3) Et fîtes la terre, et le tonnerre, 

Et tout quant est et oncques fut,

D' un seul signe, et le soleil, et le ciel.

(4) Dame, qui en bon prix se connaît,

Doit bien placer son consentement

En un preux chevalier vaillant.

(5) Ne pense qu' en Rome homme de son savoir fût.   


ENT, ENS, EN, NE, de là, en.

Cette préposition, modifiée de ces manières diverses, fut dérivée d' INDE latin:

Ja nos es obs fox i sia alumnaz;

Veder ENZ pot l' om per quaranta ciptaz. (1) Poeme sur Boece.

Ieu m' EN anarai en eyssilh. (2)

Comte de Poitiers: Pus de chantar. 

Tant l' am per fin' amor,

Que mantas vez EN plor. (3)

Bernard de Ventadour: Tant ai.

Dona, far NE podetz a vostra guisa. (4)

Rambaud d' Orange: Escotatz.


ENTRE, entre, parmi; TRO, TRO QUE, jusques, jusqu' à ce que; ENTRE QUE, MENTRE QUE, tandis que.

Ces prépositions et conjonctions furent formées de INTER, INTRA, INTRO, INTERIM latins.

Préposition. 

E sa beutaz es ENTRE las gensors

Genser, aisi com ENTRE foillas flors. (5) Aimeri: Totz hom.

(1) Jamais n' est besoin que feu y soit allumé;

Voir de là peut l' on par quarante cités.

(2) Je m' en irai en exil.

(3) Tant l' aime par pure amour,

Que maintes fois en pleure.

(4) Dame, faire en pouvez à votre guise.

(5) Et sa beauté est entre les plus gentes

Plus gente, ainsi comme entre feuilles fleur.

Préposition.

ENTR' els nessis e 'ls fatz

Sai chausir los sanatz. (1)

Arnaud de Marueil: Rasos es.

Que ENTRO a la fin del mont fora tota via cum lor. (2)

La Nobla Leyçon.

“De Savardie TRO a Justared.” (3) Acte de 1034. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, col. 190.

E escorgeron me del cap (N. E. Voire català - escorxar)

TRO al talo. (4)

Comte de Poitiers: En Alvernhe.

Conjonction.

E s' aisi pert sos dregs, ENTRE QU' es tos,

Lai quant er vielhs, en sera vergonhos. (5)

Bertrand de Born: S' ieu fos.

Qu' el cors me dis qu' ieu no chan mais,

Et amors no vol que m' en lais,

MENTRE QU' el segl' estarai vius. (6)  

Raimond de Miraval: Entre dos volers.

“MENTRE QU' els estavan en aquest parlamen.” (7) Philomena, fol. 12.

“MENTRE Thomas levava el cors de Jhesu Xrist a la messa.” (8)

Philomena, fol. 6.

(1) Entre les non savants et les fols

Sait choisir les sensés.

(2) Que jusqu' à la fin du monde serait toujours avec eux.

(3) “De Savardie jusques à Justared.”

(4) Et écorchèrent moi du chef

Jusqu' au talon.

(5) Et si ainsi perd ses droits, tandis que est jouvencel,

Là quand sera vieux, en sera honteux.

(6) Que le coeur me dit que je ne chante plus,

Et amour ne veut que m' en laisse,

Pendant qu' au siècle serai vif.

(7) “Tandis qu' ils étaient en ce parlement.”

(8) “Tandis que Thomas élevait le corps de Jésus Christ à la messe.”


Meillor amic qu' eu ai

Vos man en ostage,

ENTRO qu' eu torn de chai. (1)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei.

“En ajutori lor en seran... TRO QUE recobrat l' auran.” (2)

Acte de 1020. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, col. 179.

E no sap ren, TRO QUE s' es pres a l' ama. (3)

Bernard de Ventadour: Ben m' an perdut.

TRO est souvent conjonction, quoiqu' il ne soit pas suivi du QUE:

Me dis que tan trona TRO plou. (4)

Arnaud Daniel: Amors e jois.

Que la gota d' aiga, quan chai,

Fer en un loc tan soven,

TRO cava la pera dura. (5)

Bernard de Ventadour: Conort era.


ENSEMS, ESSEMS, ensemble. (N. E. ensemps)

D' INSIMUL latin vint cet adverbe.

Veirem, al entrar del estor,

Gran ren vassalhs ENSEMS ferir. (6)

Bertrand de Born: Be m plai lo.


(1) Le meilleur ami que j' ai

Vous mande en ôtage,

Jusqu' à ce que je retourne de çà.

(2) "En aide leur en seront... jusqu' à ce que recouvré l' auront." 

(3) Et ne sait rien, jusqu' à ce que s' est pris à l' hameçon.

(4) Me dit que tant tonne jusqu' à ce qu' il pleut.

(5) Que la goutte d' eau, quand tombe,

Frappe en un lieu tant souvent,

Jusqu' à ce que creuse la pierre dure.

(6) Verrons à l' entrer de la bataille,

Grand chose vassaux ensemble frapper.

Que no us vey lai on ESSEMS fom. (1)

Rambaud d' Orange: Er quan.


ENTORN, autour; ENVIRON, environ.

Du verbe TORNARE vint ENTORN, d' ENTORN; de GYRARE, qui a le même sens que TORNARE, vint VIRON, environ. (virare : girare, gyrare)

Préposition.

Pro ai del chan ensenhadors,

ENTORN mi, e ensenhairitz,

Pratz e vergiers, arbres e flors. (2) 

Geoffroi Rudel: Pro ai.

“ENTORN la miega nueyt.” (3) Philomena, fol. 78.

Qu' en breu aura ENVIRON de VII anz

Que m fetz amar tant fort senez mesura. (4) (N. E. senez : sense)

Gaucelm Faidit: Molt a pugnat. 

Que s met VIRON l' aureilla. (5)

Augier: Era quan.

Adverbe. Li enemic qui li perseguian eran moti d' ENTORN. (6)

La Nobla Leyçon.  

De la Francha regio

Don il es, e d' ENVIRO. (7)

Raimond de Miraval: Entre dos volers.

(1) Que je ne vous vois là où ensemble fûmes.

(2) Assez ai du chant instituteurs

Autour de moi, et institutrices,

Près et vergers, arbres et fleurs.

(3) “Environ la mi-nuit.”

(4) Qu' en bref aura environ de sept ans

Que me fites aimer tant fort sans mesure.

(5) Que se met autour de l' oreille.

(6) Les ennemis qui les poursuivaient étaient plusieurs d' entour.

(7) De la française région

Dont il est, et d' environ.


ESTIERS, ESTERS, ESTRA, autrement, hormis, outre.

Ces adverbes et prépositions vinrent d' EXTRA latin.

Aissi com cel qu' ESTERS non pot gandir. (1)

Folquet de Marseille: Ben an mort.

Ges no l' aus mostrar ma dolor,

ESTIERS adhorar, quan s' eschai

Qu' ieu la vei. (2)

Arnaud de Marueil: A guiza.

Dic en chantan ma razos,

Qu' ESTIERS no us aus descobrir

So qu' ieu ai e mon coratge. (3)

Rambaud de Vaqueiras: A vos bona.

“E van hi morir III M Sarrasis, ESTIERS los XI M davant dits.” (4) Philomena, fol. 109. 

Mentir cuiei, mas ESTRA grat dic vers. (5) (N. E. vers : ver : veritas)

Folquet de Marseille: S' al cor plagues.

(1) Mais come celui qui autrement ne peut garantir.

(2) Aucunement ne lui ose montrer ma douleur,

Hormis adorer, quand il échoit

Que je la vois.

(3) Dis en chantant ma raison

Qu' autrement ne vous ose découvrir

Ce que j' ai en mon coeur.

(4) "Et vont y mourir trois mille Sarrasins, outre les onze mille devant dits."

(5) Mentir crus, mais outre gré dis vrai.


FORAS, FORA, FORS, FOR, fors, hormis; DE FORAS, DEFOR, FORS QUE, dehors, fors que.

FORIS latin produisit FORS roman, qui reçut tour-à-tour diverses modifications légères, et devint adverbe, préposition, et conjonction.

Adverbe.

Ab tan cuia FORAS sailir... 

E DEFORAS par bels e bos... 

Aissi avols hom, ben vestitz,

Es bels DEFORS, e dins poritz. (1)

Roman de Jaufre.

Ieu get DEFOR abdos mos bras. (2)

Arnaud de Marueil: Dona genser.

Préposition.

Mas al meu chant neus ni glatz 

No m' ajuda, ni estatz,

Ni res, FORS Dieu et amors. (3)

Alphonse II, Roi D' Aragon: Per mantas.

Il pendutz es FORA de consirers. (4)

Blacas: En Pellicer.

Conjonction. 

Enans sapchatz tos temps vos amarai,

FORS QUE jamais vostres drutz no serai. (5)

Pierre Barjac: Tot francamen.

(1) Cependant cuide hors saillir...

Et dehors paraît bel et bon...

Ainsi lâche homme, bien vêtu,

Est beau dehors, et au dedans pourri.

(2) Je jette dehors l' un et l' autre mes bras.

(3) Mais à mon chant neige ni glace

Ne m' aide, ni été,

Ni rien, fors Dieu et amour.

(4) Le pendu est hors de souci.

(5) Au contraire sachez que tous temps vous aimerai,

Hors que jamais votre galant ne serai.


GAIRE, GUAIRE, beaucoup, grand chose, guères.

Cet adverbe a pu être dérivé ou de GAR, qui, dans les langues du nord, signifie beaucoup, très, exactement (1); (N. E. alemán gar nichts, gar keine enfatiza la negación, nada, ninguna) ou de GRAN RE, GAN RE, que l' on trouve dans les écrits en langue romane:

GRAN REN pogra d' autras donas ornar. (2)

Arnaud de Marueil: Anc vas amors.

“Mas GAN RE de Samaritans d' aquella cioutat crezeron en el.” (3)

Trad. du Nouv. Testament: Johan. c. 4, v. 41.

On sent que, par euphonie, GAIRE a pu être formé de GAN RE:

Que sciensa no pretz GAIRE,

S' al ops no la vey valer. (4)

Pierre d' Auvergne: Gent es.


HOI, OI, UI, UOI, HUEI, ce jour, aujourd'hui; HER, hier; DEMAN, demain.

Ces adverbes furent évidemment formés de НODIE, HERI, MANÈ.

Lo plus rics jorns es OI de la setmana. (5) (N. E. huy, hui, avui)

Bertrand de Born: Ges de disnar.

(1) Je parlerai bientôt de GAIRE comme négation explétive.

(2) Grand chose pourrait d' autres dames orner.

(3) "Mais beaucoup de Samaritains de cette cité crurent en lui."

(4) Que science ne prise beaucoup,

Si au besoin ne la vois valoir.

(5) Le plus beau jour est aujourd'hui de la semaine.


Oi val pro mais que HER. (1) (N. E. hir, ahir; ayer)

Aimeri de Peguillan: Si com l' arbres.

Non es amors, ans es enganz proatz,

Si UOI enqueretz, e DEMAN o laissatz. (2)

Blacas: Peire Vidal.

Verge, de Dieu engenairitz, sias nos HUEY en ajuda.” (3)

Philomena, fol. 15.

Mais HUEY s' oblida aco d' IER. (4)

Pierre d' Auvergne: De Dieu no.


Quelquefois MAIS se joint à HUEI comme il se joint à ORA, OR, et il signifie également désormais:

HUEIMAI seran ric portier,

Que tenran porta serrada. (5) Bertrand de Born: Rassa m' es. 

Coindas razos e novelas plazens

Digam OIMAI, e aiam bel solaz. (6)

Hugues Brunel: Coindas razos.


DESSER HUEIMAIS, de IPSA HORA HODIE MAGIS, signifie aussi désormais.

DESSER HUEYMAIS m' esbaudis. (7)

Pierre d' Auvergne: Al descebrar.


(1) Aujourd'hui vaut beaucoup plus que hier.

(2) Non est amour, au contraire est tromperie prouvée,

Si aujourd'hui recherchez, et demain le laissez.

(3) "Vierge, de Dieu engendreresse, sois nous aujourd'hui en aide."

(4) Mais aujourd'hui s' oublie cela d' hier.

(5) Désormais seront puissants portiers,

Qui tiendront porte fermée.

(6) Agréables raisons et nouvelles plaisantes

Disons désormais, et ayons beau contentement.

(7) Désormais m' esbaudis.


ENCUI, ENCOI, de IN HOC HODIE, en ce jour, aujourd'hui.

Si la mort nos penre o ENCHOY O DEMAN. (1) 

La Nobla Leyçon.

Dona nos lo nostre pan quotidian ENCHOY. (2)

Oraison Dominicale en Vaudois.


I, Y, HI, y; AISSI, AQUI, ici, là; SAI, LAI, çà, là.

D' IBI latin, en supprimant BI (comme dans tibi (ti), sibi (si), ubi (u)), vint l' adverbe de lieu I, Y romans.

Cet I combiné avec AISSO, AQUO, pronoms démonstratifs employés neutralement, forma AISSI, AQUI, ici, là. Et enfin ipsa ibi, illa ibi, produisirent SAI (ipSA Ibi), LAI (ilLA Ibi). On trouve quelquefois LA, SA.

DE est joint fréquemment à ces sortes d' adverbes:

D' un an non I poiria venir. (3)

Comte de Poitiers: Mout jauzens.

E non HI vuelh tornar jamais. (4)

Geoffroi Rudel: Belhs m' es.

Mais LA on vol, Aqui s' en pren. (5)

Bernard de Ventadour: Ab cor leial.

Quar d' AQUI mov cortesia e solatz. (6)

Arnaud de Marueil: A gran honor.


(1) Si la mort nous prendra ou en ce jourd'hui ou demain. 

(2) Donne nous le notre pain quotidien en ce jourd'hui. 

(3) D' un an n' y pourrait parvenir.

(4) Et n' y veux retourner jamais.

(5) Mais là où veut, là s' en prend.

(6) Car de là meut courtoisie et contentement.


Vos aport AICI esta lansa...

E perque? ai te ren forfait,

Mas car voil per AICI passar? (1) 

Roman de Jaufre.

Quar qui LAI mor, mais a que si vivia;

E qui SAI viu, pietz a que si moria. (2) 

Pons de Capdueil: Er nos sia.

Obre mos huelhs soptozamen;

Gart SAI e LAI tot belamen. (3)

Arnaud de Marueil: Dona genser.

Que tan no vauc ni SAI ni LAI,

C' ades no m tenha en son fre. (4) 

Bernard de Ventadour: En cossirier.

“De Bolbona EN CA del Banchets EN LA.” (5)

Acte de 1034. Pr. de l' Hist. de Languedoc t. II, col. 190. 

Préposition.

Qui tot quant es DE SAI mar conqueria, 

No 'l te nul pro, si fal a Dieu vilmen. (6) 

Pons de Capdueil: Er nos sia.

(1) Vous apporte ici cette lance... (N. E. astí, aci, açi, aquí) 

Et pourquoi? Ai à toi rien forfait,

Excepté parce que veux par ici passer?

(2) Car qui là meurt, plus a que si vivait,

Et qui çà vit, pire a que si mourait.

(3) Ouvre mes yeux subitement;

Regarde çà et là tout bellement.   

(4) Que tant ne vais ni çà ni là,

Que toujours ne me tienne en son frein.

(5) “De Bolbone en çà et du Banchet en là.”

(6) Qui tout quand est de çà la mer conquerrait,

Ne lui tiens nul profit, si manque à Dieu vilement.

L' adverbe ON, où, se joint à LAI et SAI:

Gratar me fai LAI ON no m pru. (1)

Bernard de Ventadour: Ab cor leial.

DE LAI ON pres mort e dolor. (2)

Gaucelm Faidit: Tant sui ferms.


INS, DINS, DEDINS, en, dans, dedans, au-dedans; LAINS, léans, là-dedans; SAINS, céans, çà-dedans.

INS fut dérivé d' INTUS latin; DINS représenta DEINTUS, et parfois reçut la préposition DE:

Préposition.

C' amors m' a INS el cor enclaus

Vostra valor e vostra laus. (3)

Arnaud de Marueil: Totas bonas.

Qu' anc no m' ac Norman ni Frances

DINS mon ostau. (4)

Comte de Poitiers: Farai un vers.

DEINZ de mon cor encorroz e m' azire. (5) 

Bernard de Ventadour: Per miels cobrir.

Perqu' ieu volgra estar suau e gen

DINS mon ostal, et aculhir los pros. (6)

Pistoleta: Ar agues.

(1) Gratter me fait là où ne me démange.

(2) De là où prit mort et douleur.

(3) Qu' amour m' a en le coeur enclos

Votre valeur et votre renommée.

(4) Qu' oncques ne j' eus Normand ni Français

Dans ma maison. 

(5) Au dedans de mon coeur courrouce et je bais.

(6) Pourquoi je voudrais être doucement et gentement

Dans ma maison, et accueillir les preux. 


Tro lai ont es mont Oreps,

Pueis auzim DEDINS Bethleem. (1)

Pierre d' Auvergne: Dieus vera vida.

Adverbe.

Sitot fas de joy parvensa,

Mot ai DINS lo cor irat. (2)

Bernard de Ventadour: Lo temps vai.

Per lo cor DEDINS refrescar. (3)

Comte de Poitiers: Mout jauzens.

Qu' es malvatz defors e DEDINS. (4)

Pierre d' Auvergne: Chantarai d' aquest.


LAINZ, SAINZ vinrent de ILLA INTUS, IPSA INTUS, comme LAI et SAI de ILLA IBI, IPSA IBI:

D' una donzella fo LAINZ visitatz. (5) Poeme sur Boece.

Es se LAINZ tornatz sezer...

Car no pot de LAINZ issir. (6)

Roman de Jaufre.

Cavaliers, be t tenc per ausar,

Car anc SAINS auses intrar. (7)

Roman de Jaufre.

(1) Jusques là où est mont Oreb,

Puis entendîmes dedans Bethleem.

(2) Quoique fais de joie apparence,

Beaucoup ai au dedans le coeur triste.

(3) Pour le coeur au dedans rafraîchir.

(4) Qui est mauvais dehors et dedans.

(5) D' une demoiselle fut léans visité.

(6) Est se léans tourné asseoir...

Car ne peut de léans sortir.

(7) Chevalier, bien te tiens pour oser,

Parce que oncques céans osas entrer.


JA, JAMAIS, JASSE, jamais, quoique.

Cet adverbe fut dérivé de JAM, JAM MAGIS: 

No m do Dieus nul be, à mon viven, 

S' ieu JA per re de vos amar mi tuelh. (1) 

Arnaud de Marueil: Us jois d' amor.

E JAMAIS no veirai, so cre,

Mon seigner lo rei, ni el me. (2)

Roman de Jaufre.

Cal que m fassatz, o mal o be,

Vos am, e us amarai JASSE. (3)

Arnaud de Marueil: Totas bonas.

Que s' anc virey vas autra part mon fre,

Er sui ab vos remazutz per JASSE. (4) 

Pons de Capdueil: Mielhs.

Souvent JA et MAIS sont séparés:

E JA NO voill MAIS de sos pes mover. (5)

Bernard de Ventadour: Quan vei la flor. 

E JA non volria MAIS esser residatz. (6)

Arnaud de Marueil: Aissi com cel.

(1) Ne me donne Dieu nul bien, à mon vivant,

Si je jamais pour rien de vous aimer m' ôte.

(2) Et jamais ne verrai, cela crois,

Mon seigneur le roi, ni lui moi.

(3) Quel que vous me fassiez, ou mal ou bien,

Vous aime, et vous aimerai toujours.

(4) Que si oncques tournai vers autre part mon frein,

Maintenant suis avec vous demeuré pour jamais.

(5) Et ja ne veux mais de ses pieds mouvoir.

(6) Et ja ne voudrais mais être réveillé.


Ja peut être considéré quelquefois comme conjonction, et alors il signifie quoique, bien que:

Dona, cui pretz, e jois, e jovens guida,

Ja no m' ametz, totz temps vos amerai. (1) 

Arnaud de Marueil: Aissi col peis.

C' est dans ce sens que JA, joint à SIA, a signifié quoique, soit, jaçoit:

“Karles las ac totas entendudas, JA SIA AISSO QUE elhs no s pessavo ges que elh ho agues entendut. (2) Philomena, fol. 59.

Quoique ANC et JA signifient l' un et l' autre jamais, il existe cependant entre eux une distinction importante. 

ANC n' est guères employé que pour les temps passés; 

Ja ne l' est ordinairement que pour les temps futurs: 

E JA non er, ni ANC no fo 

Bona dona senes merce. (3)

Giraud le Roux: Auiatz la.

Il y a pourtant des exemples de JA employé avec le passé, et alors il signifie jadis:

E ai JA vist per avol drut

A domna marit desamar. (4)

Guillaume Adhemar: Ieu ai ja.

(1) Dame, que prix, et joie, et jeunesse guide,

Quoique ne m' aimiez, tous temps vous aimerai.

(2) “Charles les eut toutes entendues, ja soit ce qu' ils ne se pensaient aucunement que lui cela eût entendu.” 

(3) Et jamais ne sera, ni oncques ne fut

Bonne dame sans merci.

(4) Et ai jadis vu pour vil galant

A dame mari désaimer.


JOS, DE JOS, EN JOS, en bas; SUS, DESUS, sur, dessus.

Jusum et susum, (N. E. yuso, suso, San Millán de la Cogolla) qui avaient la même acception dans la basse latinité (1), fournirent ces adverbes et ces prépositions à la langue romane.

Adverbe.

Qu' ieu lo vi en l' arena

JOS trabucar. (2)

Rambaud de Vaqueiras: El so que pus.

Qu' el Gastinel

Li saup gent DEJOTZ traire. (3)

Rambaud de Vaqueiras: El so que pus.

Tot l' auran abayssat EN JOS. (4)

Comte de Poitiers: Pus de chantar.

L' autre fon noyritz SA JOS pres Cofolen. (5) 

Comte de Poitiers: Companho farai. 

Préposition.

Del loc alsor

Jos al terral. (6)

Arnaud Daniel: Chanson d' un mot.

(1) “Jusum vis facere Deum, et te susum.”

S. Aug. Tract. VIII, in epist. I, Johan.

“Susum me honoras, jusum me calcas.” S. Aug. Ib. tract. X.

“Et posant arma sua josum.” 

Lex Alam. Tit. 45, paragr. 2, capit., t. I, p. 69. 

(2) Que je le vis en l' arène

En bas trébucher.

(3) Que le Gastinel

Lui sut gentement de bas tirer.

(4) Tôt l' auront abaissé en bas.  

(5) L' autre fut nourri ici bas près Confolens. 

(6) De lieu plus élevé

En bas au terrain.


Adverbe.

Qu' es tan poiatz que no sap tornar jos,

Ni sus non vai, tan li par temeiros! (1)

Folquet de Marseille: S' al cor plagues.

El pueg es DESUS grans et autz. (2) 

Roman de Jaufre. 

Préposition.

Mas car non poc sus el serier montar. (3) (N. E. chap. siré, fruit sirera)

Aimeri: En Berguedan.

E es SUS el caval saillitz. (4)

Roman de Jaufre.

Lo coms cui fon Belcaire

Venc al sembel

DESUS un destrier vaire. (5)

Rambaud de Vaqueiras: El so que pus.


JUSTA, JOSTA, DEJOSTA, jouxte, proche, auprès, comme.

Cette préposition fut dérivée de JUXTA latin.

Quan par la flors JUSTA 'l vert fuelh. (6) 

Bernard de Ventadour: Quan par.

Qu' ieu pretz mais jazer nutz e gen

Que vestitz JOSTA peleri. (7)

Rambaud de Vaqueiras: Ben sai e conosc.

(1) Qu' est tant élevé que ne sait retourner en bas,

Ni sus ne va, tant lui paraît dangereux!

(2) L' élévation est dessus grande et haute.  

(3) Mais parce que ne put sur le cerisier monter.

(4) Et est sur le cheval sailli.

(5) Le comte à qui fut Beaucaire

Vint au tournois

Dessus un destrier vairon.

(6) Quand paraît la fleur près la verte feuille.

(7) Que je prise plus coucher nud et gentement

Que vêtu comme pélerin.   


DEJOSTA 'ls breus jorns e 'ls loncs sers. (1)

Pierre d' Auvergne: Dejosta 'ls breus.

Se la bella on jai

No m' a DEJOSTA se. (2)

Bernard de Ventadour: Pois me preiatz.


LEU, vîte, légèrement; BEN LEU, peut-être, bientôt.

De LEVEM latin fut formé cet adverbe.

LEU signifia vîte, tost, d' après son acception primitive. En joignant BEN à LEU, l' adverbe eut un sens détourné, bien légèrement, peut-être.

Car non podetz tan LEU issir. (3) Roman de Jaufre.

Que qui non avezet aver

Gran be, plus LEU pot sostener

Afan. (4)

P. Raimond de Toulouse: Us novels.

D' amor non dei dire mas be,

Quar non ai ni petit ni re,

Quar BEN LEU plus no m' en cove. (5)

Comte de Poitiers: Pus vezem.

(1) Proche les brefs jours et les longs soirs.

(2) Si la belle où elle gît

Ne m' a auprès soi.

(3) Car ne pouvez tant vîte sortir.

(4) Que qui non accoutuma avoir

Grand bien, plus tôt peut soutenir

Chagrin.     

(5) D' amour ne dois dire davantage bien,

Parce que n' en ai ni peu ni rien,

Car peut-être plus ne m' en convient.


E dis que al fuec s' en ira

E BEN LEU aqui trobara

Qui 'l dira novas a son grat. (1)

Roman de Jaufre.


MAIS, MAS, MAI, plus, davantage, excepté, mais.

Ces adverbes et conjonctions vinrent de MAGIS latin.

Adverbe.

Reis dels cortes, e dels pros emperaire

Foratz, senher, s' aguessetz MAIS visqut. (2) 

Bertrand de Born: Mon chant.

No 'l prec MAS que s' amor m' autrei. (3) 

Arnaud de Marueil: Cui que fin' amors. 

Mas qui MAY n' a ab se,

MAI de bon pretz rete. (4)

Arnaud de Marueil: Rasos es.

Quar qui MAIS val, MAIS dopta far faillida. (5)

Arnaud Daniel: Lanquan vei.

Comme adverbe de quantité, il prend les signes de comparaison QUE et DE:

MAS vueilh murir que vivre desonratz. (6)

Blacasset: Guerra mi play.

(1) Et dit qu' au feu s' en ira

Et peut-être là trouvera

Qui lui dira nouvelles à son gré.

(2) Roi des courtois, et des preux empereur

Seriez, seigneur si eussiez davantage vécu.

(3) Ne la prie plus que son amour m' octroie.

(4) Mais qui plus en a avec soi,

Plus de bon prix retient.

(5) Car qui plus vaut, plus craint faire faute.

(6) Plus veux mourir que vivre deshonoré.


Adverbe.

Qu' anc pus la vi, non aic poder en me 

MAS d' amar leis e DE far son coman. (1) 

Pons de Capdueil: Aissi m' es pres.

Lorsque MAIS signifie hormis, excepté, c'est que le signe de comparaison QUE ou DE est comme sous-entendu:

Per que no us aus preiar MAIS en chantan. (2)

Arnaud de Marueil: Aissi com cel.

Car res no i truep MAS enjan e bauzia. (3)

Bernard de Ventadour: En amor truep.


MAIS se joint explétivement à d' autres adverbes tels que ANC, HUEI, JA, ON, etc., et les renforce.

MAIS conjonction fut beaucoup en usage:

Conjonction.

Vos amarai, vos plassa o us pes,

MAIS moult volgra mais que us plagues. (4)

Berenger de Palasol: Aissi com hom.


MALGRAT, malgré.

MALGRAT, locution employée en sens absolu, devint préposition et conjonction.

Adverbe.

Que, MAL GRAT VOSTRE, us am e us amarai

E, MAL GRAT MIEU; mas amors vos m' atrai. (5) 

Gaucelm Faidit: Mais ai poinhat.

(1) Qu' onc depuis que la vis, n' eus pouvoir en moi

Plus qu' aimer elle et que faire son commandement.

(2) Pourquoi ne vous ose prier excepté en chantant.

(3) Car rien n' y trouve hormis tromperie et trahison.

(4) Vous aimerai, vous plaise ou vous pèse,

Mais beaucoup voudrais plus que vous plût.

(5) Que, mal gré votre, vous aime et vous aimerai

Et, mal gré mien; mais amour à vous m' attire.

Adverbe.

Don, MAL MON GRAT, sufria

Penas, e dans, e dolors. (1)

Peyrols: Camjat m' a.

“E Rolland passec, MAL LUR GRAT.” (2) Philomena, fol. 20.

Préposition.

“Elhs autre s' en intrero a la ciutat, MALGRAT de Karle.” (3)

Philomena, fol. 72.

Conjonction.

Car am, MALGRAT qu' ieu n' aia. (4)

Gaucelm Faidit: De faire chanso.


MANTENEN, DE MANTENEN, maintenant, incontinent, immédiatement.

Cet adverbe vint de MANU TENENS, touchant par la main, et exprima la grande proximité et pour l' espace et pour le temps.

Qu' ieu vi ja comensar un pon,

Ab una peira solamen,

Que pois veni' a complimen;

Pueis MANTENEN

Anet cazen. (5) Gaucelm Faidit: S' om pogues.

(1) Dont, mal mon gré, souffrais

Peines, et dommages, et douleurs.

(2) “Et Rolland passa, mal leur gré.”

(3) "Les autres s' en entrèrent à la cité, malgré de Charles."

(4) Car aime, malgré que j' en aie.

(5) Que je vis jadis commencer un pont

Avec une pierre seulement,

Qui puis venait à complément;

Puis incontinent

Alla tombant.


E trais sa spaza MANTENEN. (1)

Roman de Jaufre.

Hueimais parran li ric e ill pro

E 'ls coratjos, ab ardimen,

Al be ferir DE MANTENEN. (2)

Pierre d' Auvergne: Lo senher que.

E Jaufre ven DE MANTENENT

A la porta per on intret. (3)

Roman de Jaufre.  


Avec cet adverbe je placerai DE MANES, signifiant subitement, soudainement; il vint peut-être de MANE, de bonne heure, de matin:

On non ten pro ausbercs fortz ni espes, 

Si lansa dreit, e pois trais DE MANES 

Sajetas d' aur, ab son arc asteiat. (4) 

Gaucelm Faidit: A leis cui am.

Qu' amples vestirs porton e bels arnes; 

E son arditz e feron De MANES. (5) 

Albert: Monges digatz.

(1) Et tire son épée maintenant.

(2) Désormais paraîtront les puissants et les preux

Et les courageux, avec hardiesse,

Au bien frapper incontinent.

(3) Et Jaufre va incontinent

A la porte par où entra.

(4) Où ne tient profit haubert fort et épais,

Ainsi lance droit, et puis tire subitement

Sagettes d' or, avec son arc de corne.

(5) Qu' amples vêtements portent et beaux harnois;

Et sont hardis et frappent subitement.  


MENS, MEINS, moins.

Ces adverbes vinrent de MINUS latin.

MENS preza vieure que morir,

Car vieure es trop pietz de mort. (1) 

Arnaud de Marueil: Dona sel que. 

Quan plus m' esfors, e MEINS me val. (2)

Bernard de Ventadour: Ab cor leial.


Comme plusieurs autres adverbes, MENS fut employé substantivement, et reçut même l' article:

Aissi son finas beltatz,

Que MAIS ni MEINS no i cove. (3)

Bernard de Ventadour: Ab cor leial.

Sitot amors me tormenta

E m' auci, non o planc re,

Qu' AL MENS muer per la plus genta. (4)

Sordel: Ailas! e que m fan.

(1) Moins prise vivre que mourir,

Car vivire est beaucoup pire que mort.

(2) Quand plus m' efforce, et moins me vaut.

(3) Ainsi sont parfaites beautés,

Que plus ni moins n' y convient.

(4) Quoique amour me tourmente

Et me tue, ne cela plains rien,

Vû qu' au moins meurs pour la plus gente.

(5) Que bien peut avoir chevauché

Deux lieues à tout le moins.


A TOT LO MENS forma une locution adverbiale, à tout le moins, au moins:

Que ben pot aver cavalcat

Doas legas A TOT LO MEINTZ. (5)

Roman de Jaufre. 


MEST, PER MIEI, PER MIEG, EN MIEG, parmi, au milieu, par le milieu.

Ces prépositions furent dérivées de MEDIUM. 

Car aital captenemens

No val MEST las bonas gens. (1)

Bertrand de Born: S' abril e fuelhas.

Guiraut, ben volgra fos say

Aquel bos costums PER MEST nos. (2) 

Geoffroi Rudel: Guiraut Riquier. 

Troba un cavalier nafrat

D' una lansa PER MIEI lo cors,

D' outra en outra. (3)

Roman de Jaufre.

El rossinhols s' abandona

De chantar PER MIEG lo bruelh; 

Belha m' es la retindida 

Que fai PER MIEG la giardina. (4)

P. Raimond de Toulouse: Pos lo prims.

Se combaton EN MIEG la via. (5) 

Roman de Jaufre. 

(1) Car tel gouvernement

Ne vaut parmi les bonnes gens.

(2) Giraud, bien voudrais que fut çà

Ce bon usage parmi nous.

(3) Trouve un chevalier navré

D' une lance par milieu le corps,

D' outre en outre.

(4) Le rossignol s' abandonne 

De chanter parmi le bocage:

Bel m' est le retentissement

Que fait parmi le jardin.

(5) Se combattent emmi la voie. 


OLTRA, ULTRA, OTRA, outre, au-delà.

D' ULTRA latin vint cette préposition.

Préposition.

Qu' el trametia los breus ULTRA la mar. Poeme sur Boece.

OUTRA la terra Normanda,

Part la fera mar preonda. (2) (N. E. preonda : pregon)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei per miei.


UNCA, ONCAS, ONGAN, OAN, ANC, oncques, onc; ANCMAIS, jamais; ANCSE, toujours; NONCA, jamais. (N. E. se encuentra nunqua)

UNQUAM et NUNQUAM latins fournirent ces adverbes. 

E faczia veser li cec que UNCA non havian vist. (3)

La Nobla Leyçon.

La genser e la pus bona

C' ONCAS vezeson miey huelh. (4)

Pierre Raimond de Toulouse: Pos lo prims.

Ni no m vol ONGAN auzir. (5)

Gaucelm Faidit: Lo rossinholet.

No l' auzirem doncx? non ONGUAN. (6)

Pierre Rogiers: Tant ai mon cor.

(1) Qu' il transmettait les brefs au-delà de la mer.

(2) Outre la terre Normande,

Par la cruelle mer profonde.

(3) Et faisait voir les aveugles qui oncques n' avaient vu.

(4) La plus gente et plus bonne

Qu' oncques vissent mes yeux.

(5) Ni ne me veut oncques ouïr.

(6) Ne l' ouïrons donc? non jamais. 


So que no cugei far ONGUAN. (1)

Gaucelm Faidit: Lo rossinholet.

D' un sonet vau pensan,

Per solaz e per rire,

Qu' eu no chantai OAN. (2)

Peyrols: d' un sonet.

S' ANC li fi tort, que lo m perdo. (3)

Comte de Poitiers: Pus de chantar.


MAIS se joint souvent à ANC, et parfois à HOGAN: 

El maior dol, las! qu' eu ANCMAIS agues. (4)

Gaucelm Faidit: Fortz chausa.

E ja domna non perdre HOGANMAI. (5)

Gaucelm Faidit: Ab nov cor.

Qu' ANCSE amey joc e deport. (6)

Comte de Poitiers: Pus de chantar.

Que sos hom e sos servire

Soi, et ai estat ANCSE. (7)

Gaucelm Faidit: Sitot ai.

Qu' ieu NOQUAM planh, sitot me dol. (8)

Bernard de Ventadour: Lonc temps a.

(1) Ce que ne crus faire jamais.

(2) D' un sonnet vais en pensant,

Pour amusement et pour rire,

Que je chantai oncques.

(3) Si onc lui fis tort, que le moi pardonne.

(4) Le plus grand deuil, hélas! que je jamais eusse.

(5) Et ja dame ne perdre oncques mais.

(6) Que toujours aimai jeu et amusement.

(7) Que son homme-lige et son serviteur

Suis, et ai été toujours.

(8) Que je jamais plains, quoique me fâche.  


So que dis qu' a fait aillors 

Creza, si NONCA lo jura,

E so qu' en vi desacuelha. (1)

Pierre Rogiers: Al pareissen.


A ORA, ORAS, ARA, AR, ERA, ERAS, ER, ores, maintenant. 

Cet adverbe de temps et ses modifications et contractions vinrent d' HORA latin. (2)

Enfans, en dies foren ome fello, 

Mal ome foren; A ORA sun peior. (3) Poëme sur Boece.

Si me pregues ERAS la pros comtessa. (4)

Bernard de Ventadour: En amor truep.

Ma la terza ley, la cal es ARA al temps present. (5)

La Nobla Leyçon.

"Lo castel de Laurag ni la forsas que ARA y son ni adenan y seran.” (6)

Acte de 1084. Pr. de l' Hist. de Languedoc t. II, col. 320.

(1) Ce que dit qu' a fait ailleurs

Croie, si jamais le jure,

Et ce qu' en vit désaccueille.

(2) Dans les titres anciens de foi et hommage on lit:

"DE ISTA HORA in antea."  Acte de 1025. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, p. 179.

“De AQUESTA HORA adenant." Acte de 1025. Ib.

(3) Enfants, jadis furent hommes félons,

Mauvais hommes furent; à l' heure sont pires.

(4) Si me priât à l' heure la généreuse comtesse.

(5) Mais la troisième loi, laquelle est ores au temps présent.

(6) "Le château de Laurag et les forteresses qui à présent y sont et dorénavant y seront."


Mas so que Merlis 

Prophetizan dis

Del bon rey Loys...

ARA s' esclarcis. (1)

Germonde de Montpellier: Greu m' es.

ARAS pot hom conoisser e proar

Que de bos fatz ren Dieus bon guizardo. (2) 

Rambaud de Vaqueiras: Aras pot hom. 

ARAS quan vei verdeiar. (3)

Rambaud de Vaqueiras: Aras quan vei.

Mais ER vei be que si meteis destrigua 

Sel qu' ab amor guerreia ni playeia. (4)

Sail de Scola: Gran esfortz.

Mas ERAS sai ben que vers es

Tal se cuia calfar que s' art. (5)

Arnaud de Marueil: Si que vos.

Dans la même signification, cet adverbe peut se traduire par tantôt: 

Mas tan a van cor e doptos,

Qu' ER ai lei, ERA non ai ges. (6) 

Bernard de Ventadour: Ja mos chantars. 

(1) Mais ce que Merlin

En prophétisant dit

Du bon roi Louis...

Maintenant s' éclaircit.

(2) Ores peut on connaître et prouver

Que de bons faits rend Dieu bon guerdon.

(3) Ores quand vois verdoyer.

(4) Mais à présent vois bien que soi-même embarrasse

Celui qui avec amour guerroye et plaide.

(5) Mais ores sais bien que vrai est

Que tel se croit chauffer qui s' ard.

(6) Mais tant a vain courage et craintif,

Que tantôt ai elle, tantôt n' ai aucunement.


Cet adverbe a plusieurs composés:

ENCAR, ENCARAS, ENQUERAS, etc., de IN HANC HORAM, encore.

Creis la forsa dels Sarrasis;

Jherusalem pres Saladis, (N. E. Saladino)

Et ENCARAS non es cobratz. (1)

Gavaudan le Vieux: Senhors per lo.

Ges ENQUERRAS no puesc serrar mas dens

Qu' ieu del comte non digua sa lauzor. (2) 

Aimeri de Peguillan: S' ieu anc chantiei (: chantei).


DESLOR de DE IPSA ILLA HORA, latins, ou de DES et L' ORA, romans, dès-lors:

Que ben conosc qu' anc re non amei tan,

Com ieu fauc lei, DESLORA qu' ieu fui natz. (3) 

Gaucelm Faidit: Ara cove.

Anc non agui de mi poder,

Ni no fui mieus DESLOR en sai. (4)

Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta.


QUORA vint de QUA HORA, quand:

No sai QUORA m fui endurmitz. (5)

Comte de Poitiers: Farai un vers.

(1) Croît la force des Sarrasins;

Jérusalem prit Saladin,

Et encore n' est recouvrée.

(2) Aucunement encore ne puis serrer mes dents

Que je du comte ne dise sa louange.

(3) Que bien connais qu' oncques rien n' aimai tant,

Comme je fais elle, dès l' heure que je fus né.

(4) Oncques n' eus de moi pouvoir,

Ni ne fus mien dèslors en çà.  


No sai QUORA mais la veyrai,

Que tan son nostras terras luenh. (1)

Geoffroi Rudel: Lanquan li jorn. 


On a vu précédemment DERENAN, dorénavant.

ONT, ON, où; DUNT, DON, d' où, dont.

Ces adverbes de lieu vinrent de UNDÈ latin (2), auquel parfois fut jointe la préposition DE.

E vos queric lo dur plebs,

Tro lai ONT es mont Oreps. (3)

Pierre d' Auvergne: Dieus vera vida.

Pero 'l pessar no s ne part nuech ni dia; 

Ans es pus ferms ON qu' ieu an ni m' estia. (4) 

Pierre d' Auvergne: Ab lial cor.

No sai on vauc ni ON me venc. (5)

Arnaud de Marueil: Dona genser.

Mors fo Mallios Torquator DUNT eu dig. (6)

Poëme sur Boece.

(1) Ne sais quand plus la verrai,

Vû que tant sont nos terres loin.

(2) Pendant le moyen âge on se servait souvent de UNDE:

"Si potebat habere ullam scripturam aut aliam rem UNDE ipsas res partibus suis indicare debeat."

“De id UNDE ille repetit... Quia de his UNDE me mallavit." 

Actes de 842 et de 875. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. I, col. 115, 128.

(3) Et vous chercha le dur peuple,

Jusques là où est mont Oreb.

(4) Pourtant le penser ne s' en sépare nuit ni jour;

Au contraire est plus ferme où que j' aille et je sois.

(5) Ne sais où vais ni d' où je viens.

(6) Mort fut Mallius Torquator dont je dis.



Farai un vers DON sui dolens. (1)

Comte de Poitiers: Pus de chantar.

Qui gran cor a de larguezar, 

Saber deu DONT o pod traire. (2)

Gaucelm Faidit: Cascus deu.

Quant lo vic, Karles apelec lo: E DON ves?" (3) Philomena, fol. 13.

E pois d' amor mais no m cal,

Non sai DON ni de que chan. (4)

Folquet de Marseille: Chantars.

Cet adverbe de lieu ON se joint à QUE et à PLUS:

“Moble et non moble ON QUE sia, ni qual que sia.” (5) 

Acte de 1209. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. III, col. 319.

Si qu' ab lieys es ON qu' ieu an ni estia. (6)

Blacas: Bel m' es ab motz.

Mas per so chant c' oblides la dolor

E 'l mal d' amor;

Et ON PLUS chan, plus m' en sove. (7)

Folquet de Marseille: En chantan.

C' ades me fug, ON PLUS l' apel. (8)

Bernard de Ventadour: Ab cor leial.

(1) Ferai un vers de quoi suis dolent.

(2) Qui grand desir a de prodiguer,

Savoir doit d' où cela peut tirer.

(3) "Quand le vit, Charles appela le: Et d' où viens?"

(4) Et depuis que d' amour plus ne me soucie,

Ne sais d' où ni de quoi je chante.

(5) "Meuble et non meuble où que soit, et quel que soit." 

(6) Tellement qu' avec elle est où que j' aille et sois.

(7) Mais pour ce je chante que j' oubliasse la douleur

Et le mal d' amour; 

Et où plus je chante, plus m' en souvient.

(8) Que toujours me fuit, où plus l' appelle.


OU, O, QUE, où.

D' UBI latin fut formé OU, et ensuite o dans la même acception.

Et souvent le QUE indéclinable fut employé dans le sens de QUO LOCO, QUA DIE:

Lo mas O intra inz es en gran claritat. (1)

Poëme sur Boece.

Cazut sui de mal en pena;

E vau lai O 'l cors mi mena. (2)

Bertrand de Born: Cazut sui.

Que non es jorns QU' ieu no sospir. (3)

Bernard de Ventadour: En abril.

E 'l Lazer ressorsis vos

QU' era ja quatredians. (4)

Pierre d' Auvergne: Dieus vera vida.

Ieu chant QUE devria mielhs plorar. (5)

Bernard de Ventadour: En abril.

Estat aurai estas doas sazos

QUE non chantey, e fas hy mon dampnatge. (6)

Guillaume de Saint-Didier: Estat aurai.

(1) La demeure où entre dedans est en grande clarté.

(2) Tombé suis de mal en peine;

Et vais là où le coeur me mène.

(3) Que n' est jour où je ne soupire.

(4) Et le Lazare ressucitâtes vous

Qu' il était déja quatridien.

(5) Je chante où devrais mieux pleurer.

(6) Été j' aurai ces deux saisons

Que ne chantai, et fais y mon dommage.


PART, parmi, par, à travers, au-delà.

Cette préposition vient du latin PARTIM.

Outra la terra Normanda,

PART la fera mar preonda. (1)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei per miei.

Aquest deu sobre totz granar,

E PART los autres emerar. (2)

Comte de Poitiers: Mout jauzens.

Reis Castellas, vostra valor se tria

PART las valors que tug l' autre rey an. (3) 

Folquet de Lunel: Al bon rei.


PAUC, peu. (N. E. : poc)

J' aurais pu ne pas parler de cet adverbe, attendu que sa dérivation de PAUCE latin est si évidente, qu' elle n' exige aucune explication; et par cette raison, je ne parlerai pas de plusieurs autres adverbes tels que BENЕ, MULTUM, etc.; mais PAUC, précédé d' AB ou A, devient une locution conjonctive signifiant avec peu, peu s' en faut que, et je dois en avertir:

AB PAUC ieu d' amar no m recre,

Per enueg de lauzenjadors. (4)

Arnaud de Marueil: Ab pauc.

(1) Au-delà de la terre Normande,

Parmi la sauvage mer profonde.

(2) Celui-là doit sur tous grainer,

Et au-dessus des autres briller.

(3) Roi Castillan, votre valeur on distingue

Au-delà des valeurs que tous les autres rois ont.

(4) Peu s' en faut que je d' aimer ne me lasse,

Per ennui des médisants.


Que m fan sufrir tan greu turmen,

Qu' A PAUC lo cor d' ir' e d' esmai no m fen. (1)

Pons de Capdueil: Ben sai.

On aura remarqué qu' après cette conjonction le verbe reçoit toujours la négation NO.


PER, par, pour, à cause de, au moyen de, en qualité de, etc.

La préposition latine PER ne subit aucun changement; et elle eut beaucoup plus d' acceptions.

Leu li juraria,

PER Dieu e PER ma fe,

Qu' el bes que m faria

No fos saubutz PER me. (2)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei la fuelha.

L' autre dia, PER un mati,

Trespassava PER un simmelh. (3)

Gavaudan le Vieux: L' autre dia.

Ben es fols qui l' arm' ublida

PER aquesta mortal vida. (4)

Barthelemi Zorgi: Jesu Christ.

(1) Qui me font souffrir tant grief tourment,

Que peu s' en faut que le cœur de tristesse et d' émoi ne me fende.

(2) Facilement lui jurerais,

Par Dieu et par ma foi,

Que le bien que me ferait

Ne fût su par moi.

(3) L' autre jour, par un matin,

Passais par un côteau.

(4) Bien est fou qui l' âme oublie

Pour cette mortelle vie.  


E laissa son parlar PER nos... 

E digas lor que PER m' amor 

Aucizo 'l cat. (1)

Comte de Poitiers: En Alvernhe.

Mort m' a, e PER mort li respon. (2)

Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta.


PER joint à l' O roman, signifie pour ce, pour cela,

pourtant:

PERO no soi del tot desesperat. (3)

Arnaud de Marueil: Aissi col peis.

Suivi de QUE, il devient conjonction, et signifie par quoi, c'est pourquoi:

Que plus etz blanca qu' evori;

PER QU' IEU autra non azori. (4)

Comte de Poitiers: Farai chansoneta.

Peccatz a tan dossa sabor!

PER QUE Adams lo pom trazic. (5)

Gavaudan le Vieux: Patz passien.

Il signifie aussi pourquoi:

PER QUE US vulhetz metre monja? (6)

Comte de Poitiers: Farai chansoneta.

(1) Et laisse son parler pour nous...

Et dis leur que pour mon amour

Tuent le chat.

(2) Tué m' a, et pour mort lui réponds.

(3) Pour ce ne suis du tout désespéré.

(4) Que plus êtes blanche qu' ivoire;

Par quoi je autre n' adore.

(5) Péché a tant douce saveur!

C' est pourquoi Adam la pomme prit.

(6) Pourquoi vous voulez mettre none? 


On a vu précédemment que PER, pour, devant le présent de l' infinitif, remplissait la fonction du gérondif en DUM:

De bon engenh ad ops d' amar, 

PER servir, et PER tener car, 

E PER selar, e PER sofrir. (1)

Arnaud de Marueil: Totas bonas.


PIETZ, PIEGZ, PIEZ, pire, plus mal.

Cet adverbe de comparaison vint de PEJUS. 

Quar PIETZ trai que si moria

Qui pauc ve so qu' ama fort. (2)

Sordel: Aylas! et que m fan.

Sa guerra m' es mortals,

E sa patz PIETZ de martire. (3)

Rambaud de Vaqueiras: Guerras.


PLUS, PUS, plus, davantage.

Cet adverbe de comparaison, venu du latin PLUS, n' exige aucune explication.

J' ai déja fait remarquer que parfois la langue romane l' employa précédé de l' adverbe de lieu ON.

(1) De bonne adresse à l' ouvrage d' aimer,

Pour servir, et pour tenir cher,

Et pour celer, et pour souffrir.

(2) Car pire traîne que si mourrait

Celui qui peu voit ce qu' aime fort.

(3) Sa guerre m' est mortelle,

Es sa paix pire que martyre 


POS, PUS, POIS, PUEIS, PUOIS, DE POIS, POISAS, POIS QUE, 

puis, après, depuis, pieçà, depuis que, puisque.

De POST latin furent dérivés ces adverbes et conjonctions.

Adverbe. Car si fa mal, POIS abena. (1)

Bernard de Ventadour: Amics Bernart.

Plus que d' autra qu' ieu vi PUEIS ni abans. (2)

Berenguer de Palasol: Tan m' abelis.

E POISAS delivrar los ai. (3)

Roman de Jaufre.

E anc DEPUOIS no fui ses gilozia. (4)

Augier: Erransa.

Conjonction.

Car vieure es trop pietz de mort,

PUS c' om non a joi ni deport. (5)

Arnaud de Marueil: Dona sel que. 

Le QUE est parfois sous-entendu:

E PUS no m puesc de vos amar sofrir,

Per merce us prec e per humilitat,

Qu' en vos trobes qualaquom pietat. (6)

Arnaud de Marueil: Si m destreignetz.

(1) Car si fait mal, puis fait bien.

(2) Plus que d' autre que je vis après et avant.

(3) Et pieçà délivrer les ai.

(4) Et oncques depuis ne fus sans jalousie.

(5) Car vivre est beaucoup pire que mort,

Depuis qu' on n' a joie ni amusement.

(6) Et puisque ne me puis de vous aimer cesser,

Par merci vous prie et par humilité,

Qu' en vous trouvasse quelque pitié.


Conjonction.

Pus fom amdui enfan,

L' ai amad' e la blan. (1)

Bernard de Ventadour: Lo gens temps de pascor.


A PRESEN, à découvert, à présent, maintenant.

Cet adverbe signifia à découvert, ad presentiam, et, par sens détourné, maintenant, ad presens tempus. 

Si non per aital coven

Que lui ames A PRESEN, 

E que y agues senhoria;

E mi seladatemen. (2) 

Gaucelm Faidit: N' Ugo de la.

Mas ieu no l' aus descubrir mon talan,

Si no o fes A PRESEN en chantan. (3)

Pistoleta: Anc mais nulhs.


PROP, APROP, DE PROP, EN APROP, PRES, proche, près, après.

Ces adverbes et ces prépositions vinrent de PROPE latin.

Adverbe.

C' anc tan non amey luenh ni PROP. (4)

Arnaud de Marueil: Dona sel que. 

(1) Depuis que fûmes tous deux enfants,

L' ai aimée et la flatte.

(2) Si non par tel accord

Que lui aimât à découvert,

Et que y eût domination;

Et moi couvertement.

(3) Mais je ne lui ose découvrir mon desir,

Si ne le fisse à-présent en chantant.

(4) Qu' onc tant n' aimai loin ni proche.   


De tal doussor sui resplenitz,

Quan DE PROP la puesc remirar. (1)

Bernard de Ventadour: Quan lo boscatges.

APRES comensa sa rason...

EN APRES viron un vassal. (2)

Roman de Jaufre.

Préposition.

Ben volgra que Limosis

Fos plus PROP de Mauretainha. (3)

Folquet de Marseille: Ja no volgra.

L' autre fon noyritz sa jos PRES Cofolen. (4)

Comte de Poitiers: Companho farai.

Qu' ieu sia, per sa comanda,

PRES del lieg josta l' esponda. (5)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei per miei.

S' APROP cent braus respos,

En fos d' un joi pagatz. (6)

Blacas: Lo bels douz temps.

Cal prezatz mais, e respondetz premiers; 

Et, APROP VOS, respond' En Perdigos. (7) 

Rambaud d' Orange: En Azemars.

(1) De telle douceur suis rempli,

Quand de près la puis voir.

(2) Après commence sa raison...

Après virent un vassal.

(3) Bien voudrais que Limousin 

Fût plus près de Mortagne.  

(4) L' autre fut nourri çà bas près Confolens.

(5) Que je sois, par son commandement,

Près du lit juste au bord.

(6) Si après cent dures réponses,

En fusse d' une joie payé.

(7) Quel prisez plus, et répondez premier;

Et, après vous, réponde sieur Perdigon.

 

Préposition.

Molt valra 'l bens APRES l' afan. (1)

Bernard de Ventadour: Non es meraveilla.

Je place ici SEGUENTRE, signifiant aussi après.

Préposition.

E de seguentre lui, manj 'en lo reis Franceis. (2)

Sordel: Planher vuelh.

APRES, avec le QUE, devient conjonction.


QUAN, QUANT, CAN, CANT, LANQUAN, quand, lorsque.

Cette conjonction fut formée de QUANDO latin.

QUANT ieu serai partit de vos. (3)

Comte de Poitiers: Pus de chantar.

Ordinairement le T final n' est conservé que devant les voyelles.

De ILLO ANNO QUANDO vint LANQUAN (ilLO ANno QUANdo):

LANQUAN fuelhon bosc e guarric. (4)

Bernard de Ventadour: Lanquan fuelhon.

QUANT, autant, autant que, combien.

Cet adverbe vint de l' adverbe latin QUANTUM.

Il ne quitte jamais le T final.

E QUANT aurem de tort et de peccat, 

Trobarem totz al jorn del jutjamen. (5) 

Folquet de Romans: Quan lo dous temps.


(1) Beaucoup vaudra le bien après le chagrin.

(2) Et après lui, mange en le roi Français.

(3) Quand je serai séparé de vous.

(4) Lorsque feuillent bois et forêts.

(5) Et autant que aurons de tort et de péché,

Trouverons tous au jour du jugement.


Halas! QUANT cuiava saber

D' amor, e QUANT petit en sai! (1)

Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta.

 

QUAR, CAR, car, parce que, pourquoi, à cause que, c' est pourquoi.

Cette conjonction fut dérivée de QUARE latin. 

CAR ilh avian invidia, CAR la gent lo seguia. (2)

La Nobla Leyçon.

Per Deu e per merce, vos clam

Que no us sia greu CAR vos am. (3)

Arnaud de Marueil: Totas bonas.

Il est quelquefois employé dans le sens de QUE: 

Gentils dona, plazens tan m' es,

Car vos am sobre onratz honors. (4)

Blacasset: Ben volgra.

Amors, alegres part de vos,

Per so car vau mon miels queren. (5) 

Geoffroi Rudel: Quan lo rossignols. 

(1) Hélas! Combien cuidais savoir

D' amour, et combien peu en sais!

(2) Car ils avaient envie, parce que la gent le suivait.

(3) Par Dieu et par merci, vous crie

Que ne vous soit grief parce que vous aime.

(4) Gentille dame, plaisante tant m' êtes,

Que vous aime au-dessus d' honorés honneurs.

(5) Amour, alegre me sépare de vous,

Pour ce que vais mon mieux cherchant. 


SEGON, SEGON QUE, selon, selon, selon que. 

SECUNDUM latin produisit cette préposition et cette conjonction.

Préposition.

Mas, SEGONT lor poer, hi fan empachament. (1)

La Nobla Leyçon.

(1) Qu' ieu non vuelh, dona, joi ni be,

Mas SEGON la vostra merce. (2)

Arnaud de Marueil: Dona sel que.

Conjonction.

SEGON QUE s pot sempre faire. (3)

Pierre d' Auvergne: Ab fina joia.


SEMPRE, toujours.

Par une légère modification (metátesis ER : RE), très usitée dans la langue romane, cet adverbe vint de SEMPER latin.

Que tota ora SEMPRE vai chaden. (4)

Poëme sur Boece.


SENES, SENS, SES, SANS, sans.

De SINE latin fut formée cette préposition qui reçut diverses modifications.

Tots sos faitz sap acabar e complir

Ab segur sen, SES reguart de faillir, (5)

(1) Mais, selon leur pouvoir, y font empêchement.

(2) Que je ne veux, dame, joie ni bien,

Excepté selon la votre merci.

(3) Selon que se peut toujours faire.

(4) Qui à toute heure toujours va en tombant.

(5) Tous ses faits sait achever et accomplir

Avec sûr sens, sans danger de faillir.  


E SES mal gienh, SES blasm' e SENS folia, 

SES enveg dir, e SENES vilania. (1) 

Berenguer de Palasol: Aital dona cum.

“En la sua potestat de Guillem lo tournara SANS deception.” (2) 

Acte de 1059. Pr. de l' Hist. de Languedoc, t. II, col. 230.

SI, si.

La conjonction latine SI fut employée sans modification.

Mort sui, SI us am; e mort, SI m part de vos. (3)

Giraud le Roux: Auiatz la derreira.

Dona, SI no us vezon mei huelh,

Ben sapchatz que mos cors vos ve. (4)

Bernard de Ventadour: Quan par la flors.

Souvent l' I subit l' élision.

SI, ainsi; SI QUE, tellement que; AISSI, ainsi, de même.

Cet adverbe vint du latin SIC.

SI t' o tenrei... E SI t' o tendrai, e SI O atendrai a ti.” (5) 

Actes de 960. MS. de Colbert.

(1) Et sans male adresse, sans blâme et sans folie,

Sans envie dire, et sans vilenie.

(2) "En la sienne puissance de Guillaume le rendra sans déception." 

(3) Mort suis, si vous aime; et mort, si me sépare de vous.

(4) Dame, si ne vous voient mes yeux,

Bien sachez que mon coeur vous voit.

(5) "Ainsi te cela tiendrai... Et ainsi te cela tiendrai, et ainsi cela conserverai à toi." 


Us amicx et una amia, 

Sordel, an SI un voler, 

C' a lur semblan, non poiria

L' us ses l' autre joi aver. (1) 

Guillaume de la Tour: Us amicx.

Ja dous' amors, que m' a conques,

Me ten SI QUE no m vir alhors! (2) 

Blacasset: Ben volgra.

Parfois il signifie cependant, pourtant: 

Mi faitz orguelh en digz et en parvensa; 

E SI etz francs vas totas autras gens. (3)

Comtesse de Die: A chantar m' er.

Et d' autres fois alors:

"Al temps qu' En Richartz era coms de Peitieus, ans qu' el fos reis, Bertrans de Born SI era sos enemics, per so qu' En Bertrans volia ben al rei jove.” (4) Argum. de la Sirvente: NON PUOSC, MS. de la Bibl. roy. 7225.


AISSI vint de SIC en y joignant A:

Paure era Nostra Dona, e Joseph ASI. (5)

La Nobla Leyçon. 

(1) Un ami et une amie,

Sordel, ont tellement même vouloir,

Qu' à leur avis, ne pourrait

L' un sans l' autre joie avoir.

(2) Déja douce amour, qui m' a conquis,

Me tient tellement que ne me tourne ailleurs.

(3) Me faites orgueil en dits et en apparence,

Et pourtant êtes franc vers toutes autres gens.

 (4) "Au temps que sire (mossen : En) Richard était comte de Poitou, avant qu' il fût roi, Bertrand de Born alors était son ennemi, parce que sire Bertrand voulait bien au roi jeune.”

(5) Pauvre était Notre Dame, et Joseph aussi.


Quant AISSI auzets esbaudir 

Lo rosignolet (rossignolet) nuoit e jorn. (1) 

Bernard de Ventadour: Amics Bernartz.

EN AISSI fos pres, com ieu sui,

Mos Alvernhatz, e foram dui. (2) 

Bernard de Ventadour: Lo rossignols. 

Il peut être suivi du QUE:

E sui AISSI meitadatz,

QUE no m desesper,

Ni aus esperans' aver. (3)

Folquet de Marseille: Uns volers.


On a vu précédemment AISSI COM, COSSI, etc.

Conjonction.

C' AISSI COM sai perdonaran, 

Sapchatz c' aital perdon auran 

Lai on er fatz lo jutjamen. (4)

Pons de Capdueil: En honor del.


ALTRESI venant du latin ALTERUM SIC signifia aussi, de même, et prit quelquefois COM:

Adverbe.

Mas er es temps que diz hom de mal be,

Et ATREISI, que del ben diz hom mal. (5)

(1) Quant ainsi oyez esbaudir

Le rossignol nuit et jour.

(2) Ainsi fût pris, comme je suis,

Mon Auvergnat, et serions deux.

(3) Et suis ainsi divisé par moitié,

Que ne me désespère,

Ni ose espérance avoir.

(4) Qu' ainsi comme çà pardonneront,

Sachez que tel pardon auront

Là où sera fait le jugement.

(5) Mais à-présent est temps que dit on du mal bien,

Et aussi, que du bien dit on mal.

  

Conjonction.

ATRESI COM l' orifans

Que, quan chai, no s pot levar. (1)

Richard de Barbezieux: Atresi com.

De SIC latin fut dérivée la particule affirmative SI, oui: 

(N. E. ¿Y de dónde proviene la partícula afirmativa OC?)

La ley velha deffent solament perjurar,

E plus de SI o de no non sia en ton parlar. (2)

La Nobla Leyçon.


SITOT, quoique, bien que.

Conjonction.

E SITOT Venta freg' aura, 

L' amor qu' ins el cor mi muev, (mueu : mou)

Mi ten caut, on plus yverna. (3) 

Arnaud Daniel: Ab guay so.

E s' aman muer, domna, sui merceians, 

Qu' en la mort prenc honor, SITOT m' es dans. (4) 

Blacasset: Si m fai. 


SIVALS, du moins, pourtant.

Adverbe.

S' a lieis no platz qu' entenda en s' amor,

Tos temps SIVALS retrairai sa valor. (5)

Pons de Capdueil: Un guai descort.

(1) De même que l' éléphant

Qui, quand tombe, ne se peut relever.

(2) La loi vieille défend seulement parjurer,

Et plus que si ou que non e soit en ton parler.

(3) Et quoique vente froid air,

L' amour qui au-dedans du cœur me meut,

Me tient chaud, où plus hiverne.

(4) Et si en aimant meurs, dame, suis remerciant,

Vû qu' en la mort prends honneur, bien que m' est dommage.

(5) Si à elle ne plait que prétende en son amour,

Tous temps pourtant retracerai sa valeur. 


Adverbe.

L' an molt de remaner pregat,

SIVALS tro que agues manjat. (1)

Roman de Jaufre.


SOBRE, DESOBRE, sur, dessus; SOTZ, DESOTZ, sous, dessous.

SUPER et SUBTUS latins produisirent ces prépositions et adverbes.

Préposition.

SOBRE sans li juraria

C' autre jois el mon no m sia. (2)

Bernard de Ventadour: En cossirier.

Mas ilh val SOBR' ellas mais,

Tant quant val aurs plus qu' arena. (3)

Bertrand de Born: Cazutz sui de mal.

Chantan DESOBRE la verdor. (4)

Roman de Jaufre.

E 'ls riu son clar DESOBRE los sablos. (5)

Bernard de Ventadour: Belh Monruelh.

Adverbe. “Sant Peyre fo pausa en la croc, li pe DESOBRE e lo cap DESOT.” (6) (N. E. chap. San Pere va sé posat a la creu, los peus a dal y lo cap abaix.)

Doctrine des Vaudois.

Préposition.

Que re mais SOTZ cel non envei. (7)

Bernard de Ventadour: Lanquan fuelhon.

(1) L' ont moult de rester prié,

Du moins jusqu' à ce que eût mangé.

(2) Sur saints lui jurerais

Qu' autre joie au monde ne me soit.

(3) Mais elle vaut au-dessus d' elles plus,

Autant que vaut or plus qu' arène.   

(4) En chantant sur la verdure.

(5) Et les ruisseaux sont clairs dessus les sables.

(6) "Saint Pierre fut placé en la croix, les pieds dessus et le chef dessous." 

(7) Que rien plus sous ciel n' envie.


Adverbe.

Per qu' es DESSUS e 'ls autres son DESOTZ. (1) 

Rambaud de Vaqueiras: Aras pot hom.

Préposition. 

Sicum l' auzel son tug SOTZ Aurion,

Son las autras SOTZ la gensor del mon. (2) 

Bertrand de Born: Quan la novella. 


SOVEN, SOVENT, souvent.

Cet adverbe fut dérivé de SÆPE.

Bon conseil vos don e gen:

Amaz e cantaz SOVEN. (3)

Peyrols: Quant amors.


TANT, TAN, AITAN, ALTRETAN, tant, autant.

Ces adverbes furent formés de TANTUM.

TAN de bon cor vos am! (4)

Arnaud de Marueil: Ses joi non es.

TAN gais e TAN amoros

Eraz en vostras chansos. (5)

Peyrols: Quant amors.

Can vi que TAN fort fos feritz,

Cuiei me que fosetz fenitz. (6)

Roman de Jaufre.


(1) Pourquoi est dessus et les autres sont dessous.

(2) De même que les oisels sont tous au-dessous Orion,

Sont les autres au-dessous la plus gente du monde.

(3) Bon conseil vous donne et gent:

Aimez et chantez souvent.

(4) Tant de bon coeur vous aime!

(5) Tant gai et tant amoureux

Étiez en vos chansons.

(6) Quand vis que tant fort je fusse frappé,

Cuidai moi que fussiez mort.



TAN devient conjonction, en recevant QUAN:

Conjonction.

Que TAN QUAN solelhs raya,

Non a domna cui tan ricx pretz s' eschaia. (1)

Pons de Capdueil: Humils e fis.

TAN QUAN ten terra ni dura. (2)

Bernard de Ventadour: Lanquan fuelhon.

Adverbe.

Qu' ieu fui d' AITAN melhuratz

Qu' ome de mi no vey plus ric. (3)

Bernard de Ventadour: Lanquan fuelhon.

TAN m' es greu que trichaire 

Aia joy ab engan,

O plus, o ALTRETAN,

Com cel qu' es fis amaire! (4)

Bernard de Ventadour: Quan la doss' aura.


AB TANT, AB AITANT, signifièrent pourtant, cependant, alors.

Adverbe.

AB TANT lo seneschals escrida. (5)

Roman de Jaufre.

AB AITANT lo reis aras sona

Son nebot mon senher Galvan. (6)

Roman de Jaufre. 

(1) Que autant que soleil rayonne,

N' a dame à qui tant riche prix échoie.

(2) Autant que terre tient et dure.

(3) Que je fus d' autant amélioré

Qu' homme que moi ne vois plus puissant.

(4) Tant m' est grief que trompeur

Ait joie avec tromperie,

Ou plus, ou autant,

Comme celui qui est pur amant.

(5) Cependant le sénéchal s' écrie.

(6) Cependant le roi ores sonne

Son neveu mon seigneur Gauvain. 


PER TAN signifia pourtant:

E si m fetz mal, e no m voletz aver

Franc chauzimen, ges PER TANT no m n' irais. (1)

Pons de Capdueil: Tant m' a donat.


TAN NI QUAN, tant et quant, aucunement, jamais.

Ges no m recre d' amar lei TAN NI QUAN. (2)

Gaucelm Faidit: Era cove.

Mas no y a d' ira TAN NI QUAN,

Qu' el dans n' es pros e 'l mals n' es bes. (3)

Pierre Rogiers: Tant ai mon cor.


TOST, tôt, bientôt, vîte.

E cort tan TOST que res no il pot fugir. (4)

Gaucelm Faidit: A leis cui am.

Cansos, vai t en TOST en corren. (5)

Gaucelm Faidit: S' om pogues.


TOT, DEL TOT, totalement, du tout, entièrement.

Cet adverbe dérivé du latin fut employé parfois avec une préposition et l' article:

Per que m sui DEL TOT a vos donatz. (6)

Arnaud de Marueil: Aissi com cel c' ama.


(1) Et si me faites mal, et ne me voulez avoir

Franc choix, aucunement pourtant ne m' en irrite. 

(2) Nullement ne me lasse d' aimer elle tant et quant.

(3) Mais n' y a de tristesse aucunement,

Vû que dommage en est profit, et le mal en est bien.

(4) Et court tant vîte que rien ne la peut fuir.

(5) Chanson, va-t-en vîte en courant.

(6) Pourquoi me suis entièrement à vous donné.


Parfois cet adverbe se joint à des adverbes ou conjonctions: 

TOT ALTRESI, TOT QUANT, TOT AISSI COM, etc.

Souvent l' adjectif TOT est employé avec des substantifs romans en locution adverbiale.

TOTZ JORNS, TOTA DIA, TOTZ TEMPS, TOTAS SAZOS, TOTAS HORAS, TOTA VIA, etc., signifièrent toujours, sans cesse, en tous temps, etc.

On a vu des exemples de toutes ces locutions.


TRAVERS, travers.

Cette préposition fut formée du latin TRANSVERSUS. 

E puois c' A TRAVERS non poinha. (1) 

Arnaud Daniel: Lanquan son passat.

C' A TRAVERS lo 'n a tot trencat. (2)

Roman de Jaufre.


TROP, très, trop.

TROPPUS, dans la basse latinité, signifiait multitude, foule, troupeau:

Si en TROPPO de jumentis. LEX ALAMAN. Tit. 72, §. I.

On peut conjecturer que ce mot a fourni l' adverbe roman TROP, qui a le sens de beaucoup, très, trop. Voici des exemples de la première acception:

“Perdigons si fo joglars, e sap TROP ben violar e trobar.” (3)

Vie de Perdigon. MS. de la Bibl. du Roi, 7225, fol. 49.

(1) Et puis qu' à travers ne pique.

(2) Qu' à travers l' en a tout tranché.

(3) “Perdigon assurément fut jongleur, et sut très bien jouer de la vielle

et trouver.” (N. E. violar: tocar la viola)


“TROP e mielhs estarem a nostra guisa.” (1) Philomena, fol. 21.

TROP ameron lo mont, e poc lo paradit. (2) La Nobla Leyçon.

E si merces ab vos non a que faire, 

Ma vida m val TROP meins que si moria. (3) 

Arnaud de Marueil: Aissi com selh.

Voici des exemples de la seconde acception:

Per qu' om no s deu per gaug TROP esjauzir,

Ni per ira TROP esser anguoyssos. (4) 

Gaucelm Faidit: Maintas sazos.

E sacha qu' en breu la veirai,

Si TROP grands afars no m' en te. (5)

Pierre Rogiers: Tant ai mon cor.


TRUESCA, DUESCA, jusque.

Ces prépositions furent dérivées d' USQUE latin, en y joignant DE et TRO romans.

DUESC' al jorn que ajorna. (6)

Arnaud Daniel: Lanquan vei.

Com el a pres d' Agen TRUESC' a Clermon. (7)

Bertrand de Born: Quan la novella. 

(1) “Beaucoup et mieux serons à notre guise." 

(2) Beaucoup aimèrent le monde, et peu le paradis. 

(3) Et si merci avec vous n' a que faire,

Ma vie me vaut beaucoup moins que si mourais.

(4) Pourquoi on ne se doit par joie trop réjouir,

Ni par tristesse trop être angoisseux.

(5) Et sache qu' en peu la verrai,

Si trop grande affaire ne m' en tient.

(6) Jusques au jour qui éclaire.

(7) Comme il a pris d' Agen jusques à Clermont.


VES, VAS, VAIS, ENVES, ENVERS, DEVES, vers, envers, en comparaison, devers.

VERSUS latin produisit cette préposition, qui fut diversement modifiée:

Préposition. 

E EVERS Deu no torna so talant. (1)

Poëme sur Boece.

VES se me tira com aimanz. (2)

Bernard de Ventadour: Lanquan vei per miei.

VAS qual part tenrem, ni vas on

Penre port! tot lo cor m' en fon. (3) 

Augier: Cascus plor.

Ma chansos

An VAIS Vos,

Amia, lai on etz. (4)

Gaucelm Faidit: Per l' esguar.

Eras no sai DEVES qual part me vire. (5)

Pons de la Garde: Sitot no m' ai.

Quan la doss' aura venta

DEVES vostre pays. (6)

Bernard de Ventadour: Quan la doss' aura.

(1) Et envers Dieu ne tourne sa volonté.

(2) Vers soi me tire comme aimant.

(3) Vers quelle part tiendrons, et vers où

Prendre port! tout le coeur m' en fond.

(4) Ma chanson

Va vers vous,

Amie, là où êtes.

(5) Ores ne sais devers quelle partie me tourne.

(6) Quand le doux vent souffle

Devers votre pays. 


Préposition.

Qu' en aissi sui enganada e trahida,

Com si agues VAS lui fag falhimen. (1)

Comtesse de Die: A chantar.

Que tuit son fals VAS mi li plus leial. (2) 

Bernard de Ventadour: Quan par la flors.

Digas li que mos Azimans

Mi ten quar ENVAS lei non vau. (3)

Bernard de Ventadour: Ges de chantar.

Conjonction.

Totz autres joys fora petitz,

VAS QUE lo mieus joys fora grans. (4)

Bernard de Ventadour: Pels dolz chans.


VETI, VECVOS, VEUS, voi toi, voyez vous, voici, voilà.

Cette préposition qui remplace l' ECCE latin, signifie voyez, voyez ici.

VETI que per encantamen

Fes pantayar verayamen

A ta molher qu' el delivresses. (5)

La Passio de Jhesu Crist.

VECVOS del vers la fi. (6)

Geoffroi Rudel: Lanquan vei.

(1) Qu' ainsi suis trompée et trahie,

Comme si eusse vers lui fait faute.

(2) Que tous sont faux en comparaison de moi les plus loyaux.

(3) Dis lui que mon Azimant

Me tient que vers elle ne vais.

(4) Toute autre joie serait petite,

En comparaison de ce que la mienne joie serait grande.

(5) Voici que par enchantement

Fit réver véritablement

A ta femme que le délivrasses.

(6) Voici du vers la fin.


“E mentre que elhs estavan en aquest parlament, de la valh VECVOS un messager de Karle.” (1) Philomena, fol. 13.

VEUS tot lo tort en que m' avetz trobat. (2)

Arnaud de Marueil: Si m destreignetz.

VEUS m' al vostre comandamen. (3)

Bernard de Ventadour: Non es meraveilla.

Dans le poème sur Boece on trouve:

FEVOS Boeci cadegut en afan. (4)

Poëme sur Boece.

(1) "Et tandis qu' ils étaient en ce parlement, de la vallée voici un messager de Charles.”

(2) Voilà tout le tort en quoi m' avez trouvé.

(3) Voici moi à votre commandement.

(4) Voici Boece tombé en souci.


Après avoir exposé l' origine et la dérivation de la plupart des adverbes, prépositions, et conjonctions de la langue romane, il me reste à faire séparément un examen rapide de ces divers éléments du discours.

Adverbes Romans.

En général, les adverbes peuvent être définis des adjectifs indéclinables, qui, s' attachant quelquefois à l' adjectif ordinaire, et le plus souvent au verbe, remplissent à leur égard la même fonction que remplit l' adjectif déclinable, alors qu' il modifie le substantif auquel il se rapporte.

J' établis cinq divisions au sujet des adverbes romans. 

La première division concerne les adverbes terminés en MEN;

La seconde ceux qui n' ont pas cette terminaison, soit qu' ils aient été dérivés du latin, soit qu' ils aient été formés extraordinairement par la langue romane;

La troisième s' applique aux adjectifs qui remplissent la fonction d' adverbes, parce qu' ils sont employés neutralement et en forme absolue;

La quatrième indique l' usage de la grammaire romane, qui employe souvent substantivement plusieurs de ses adverbes, lesquels deviennent alors sujets ou régimes, et même reçoivent l' article qui caractérise ordinairement les substantifs ou les noms employés substantivement;

La cinquième est relative à l' usage des locutions adverbiales dans la langue romane.


Première division.

Adverbes romans en men.


Dans les éléments de la grammaire romane avant l' an 1000, j' ai indiqué de quelle manière s' était formée la désinence caractéristique MENT de la plupart des adverbes de cette langue.

MENT de MENTE latin étant féminin, l' adjectif roman, auquel il a été joint pour former un adverbe, a pris nécessairement la terminaison qui appartient au genre féminin:

“Ne no l' en decebra ne malament.” (1) Acte de 960. Ms. de Colbert.

Mais quand l' adjectif était du genre commun, il n' a pas pu prendre la terminaison féminine A:

Qu' ieu vos sia homs, mas juntas, HUMILMEN. (2) 

Arnaud de Marueil: Us joys d' amor. 

Je dois faire deux observations particulières:

1.° Ces adverbes sont assez arbitrairement terminés en MENT, MEN, ou MENS. (3)

2° Quelquefois ils sont précédés d' une préposition. (4)

(1) “Ni ne l' en trompera ni malement.”

Belamen p. 304. Diversamen 116. Finamen 191.

Guayamen 138. Malament 169. Raucament 129.

Solamen 243. Veramen 120. Verayament 250.

(2) Que je vous sois homme-lige, mains jointes, humblement.

Formen 243. Humilmen 178. Soptilmen 193.

(3) Eissament 115. Eissamen 118. Eyssamens 116.

(4) En breumen 246.


Deuxième division.

Adverbes dont la terminaison n' est pas spéciale.

Ces adverbes ont été formés,

1° Du latin, en suivant toujours ou presque toujours le systême des suppressions des désinences:

BEN de BENE. CLAR de CLARE. MAL de MALE. PAUC de PAUCE. TART de TARDE. Etc. etc.

2.° Par la langue romane même, qui les a appropriés à ses besoins.

Bais bas. Petit peu.

Pron assez. Trop beaucoup, etc.


Troisième division.

Adjectifs employés neutralement en forme d' adverbes.

Com GEN fui per vos honratz. (1)

Bernard de Ventadour: Conort era.

Les précédentes citations ont souvent offert l' exemple de cet emploi des adjectifs en forme adverbiale.

Ils prennent même des prépositions:

EN ESCUR vauc com per tenebras. (2)

Folquet de Marseille: Senher Dieu.


Quatrième division.

Adverbes employés substantivement.

J' ai dit que ces adverbes furent susceptibles de devenir sujets ou régimes, et que parfois ils reçurent l' article qui s' attache aux substantifs, et sert à les distinguer.

Sujet. Que MAIS ni meins no i cove. (3)

Bernard de Ventadour: Conort era.

(1) Comme gentement fus par vous honoré.

(2) En obscur vais comme par ténèbres.

(3) Que plus ni moins n' y convient.


Régime.

Qu' er trobaretz tot LO MAIS de las gens

Que si menton, ni s ne volon celar. (1) 

Guillaume Anelier: El nom de Dieu.

E don m' en un bais d' estrena,

E, segon servizi, 'L MAIS. (2)

Arnaud de Marueil: Bel m' es quan.

E pus en joi vuelh revertir,

Ben dey, si puesc, AL MIELS anar. (3) 

Comte de Poitiers: Mout jauzens.

"Venc l' un vais l' autre, ALH PUS TOST que poc. (4)

Philomena, fol. 72.

Ans que la mort me sobrevengua,

Quan non poiria menar la lengua;

Car penedensa DEL ADONCX 

No val a l' arma quatre joncx. (5) 

Folquet de Marseille: Senher Dieu.

E sol que cor aia de mi membransa, 

DEL PLUS serai atendenz e sofrire. (6) 

Hugues Brunel: Cortesamen. 

(1) Qu' à-présent trouverez tout le plus des gens

Qui ainsi mentent, et s' en veulent celer.

(2) Et donne m' en un baiser d' étrenne,

Et, selon le service, le plus.

(3) Et puisqu' en joie veux retourner,

Bien dois, si puis, au mieux aller.

(4) Vint l' un vers l' autre, au plutôt que put.

(5) Avant que la mort me survienne,

Quand ne pourrais mener la langue;

Car pénitence de l' alors

Ne vaut à l' âme quatre joncs.

(6) Et seulement que coeur ait de moi remembrance,

Du plus serai attendant et souffrant.    


Régime.

Mas car vos sai conoiser e chausir

Per la meillor, et AB MAIS de beltat. (1)

Arnaud de Marueil: Si m destreignetz.


Cinquième division.

Locutions adverbiales.

La langue romane se servit de différentes locutions adverbiales; on a eu occasion d' en remarquer plusieurs dans les diverses citations qui précèdent: (2)

Tant esteram rescondut a RESCOS,

Tro 'ls lauzengiers agron mortz los gelos. (3)

Pons de Capdueil: Per joy d' amor.

L' explication de ces locutions appartient spécialement au dictionnaire de la langue.

(1) Mais parce que vous sais connaître et choisir

Pour la meilleure, et avec plus de beauté.

(2) AL MEU SEMBLAN, à mon avis 115.

MON ESCIEN, à mon escient 317.

AL MIEU VIVEN, pendant ma vie 174.

MAL MON GRAT, malgré moi 383.

(3) Tant serions celés à cachette,

Jusqu' à ce que les médisants eussent tué les jaloux.


Prépositions.

J' ai précédemment indiqué les principales prépositions de la langue romane. On a vu que souvent elles se formaient d' un adverbe, sur-tout par l' adjonction d' une particule qui leur imprimait le caractère et la fonction de prépositions; on a vu aussi qu' elles devenaient adverbes à leur tour, lorsqu' elles étaient employées sans régime; et enfin qu' elles devenaient aussi conjonctions, quand elles étaient suivies d' un signe ou d' une particule qui leur permettait de servir de lien entre les membres de la phrase, ou entre les phrases mêmes.

Dans la langue latine, les prépositions transmettaient toujours une action sur le substantif ou sur le nom employé substantivement, soumis à leur régime, en un mot, sur le nom qu' en langage grammatical on appelle Conséquent; le cas de ce régime était autre que le nominatif: de même les formes de la langue romane ont en général assujéti le substantif ou le nom employé substantivement, après une préposition, à prendre le signe qui exprime et caractérise le régime.

Il serait superflu d' indiquer des exemples; dans les citations déja faites, on aura reconnu qu' après les prépositions, les noms qu' elles gouvernent prennent toujours les caractères et les signes qui appartiennent aux régimes.

La langue romane, à l' exemple de la langue latine, a souvent adjoint à ses verbes, et même aux substantifs et adjectifs, une préposition antécédente, qui quelquefois se confondait avec ces noms, et d' autres fois y était seulement adhérente, mais sans les soumettre eux-mêmes comme régimes; car alors ces prépositions devenaient en quelque sorte des adverbes.

Il est même à remarquer que la préposition incorporée ou adhérente n' empêchait pas soit le substantif, soit le nom qui en faisait la fonction, de prendre le signe du sujet ou celui du régime.

En voici des exemples:

Sujet.

E s' ieu en re mesprenc el dir,

SOBRETEMERS me fai failhir. (1) 

Arnaud de Marueil: A guisa de.

Régime.

Sols suy qui sai lo SOBRAFAN que m sortz

Al cor, d' amor sofren per SOBRAMAR. (2) 

Arnaud Daniel: Sols suy qui.

Ben sai que, per SOBREVALER,

Dei far miels so qu' ai en talan. (3)

Pons de Capdueil: Ben sai.

(1) Et si je en rien me méprends au dire,

Sur-craindre me fait faillir.

(2) Seul suis qui sais le sur-chagrin qui me surgit

Au coeur, d' amour souffrant pour sur-aimer.

(3) Bien sais que, pour sur-valoir,

Dois faire mieux ce qu' ai en desir.


Conjonctions.

Presque toutes les conjonctions romanes furent formées par l' adjonction du QUE indéclinable.

Ce que j' ai dit de l' origine ou de la dérivation des principales conjonctions romanes, me paraît suffisant.

On se souviendra que souvent le QUE est sous-entendu. Je présenterai seulement quelques détails relatifs aux particules conjonctives et disjonctives.


Particules conjonctives.

ET, E, NI, et.

La langue romane adopta ET, conjonction latine; mais au-devant des mots qui commencent par des consonnes, le T final fut ordinairement supprimé:

Temutz era E mot prezats. (1)

La Vida de San Alexi.

Cel que fetz l' air, E cel, E terr', E mar,

E caut, E freg, E vent, E pluei', E tro,

Vol qu' el sieu guit passem mar tug li pro,

Sicom guidet Melchior E Gaspar. (2) 

(N. E. No aparece Baltasar.)

Rambaud de Vaqueiras: Aras pot hom.

NI signifia à-la-fois et et ni, mais eut plus souvent la première acception que la seconde.

Je ne l' examine à-présent que sous la première acception.

Dans cette première acception, il n' y a jamais de négation dans la phrase:

Quar ieu sai don venc NI on vauc. (3)

Trad. du Nouv. Testament: Johan. c. 8, v. 14.

Vas qualque part qu' ieu an, NI m vuelf, NI m vire. (4)

Arnaud de Marueil: Aissi com selh.

Si m' estessetz a razon,

Bona dona, NI a dreg. (5)

Rambaud de Vaqueiras, Guerras ni platz.



(1) Craint était et moult prisé.

(2) Celui qui fit l' air, et ciel, et terre, et mer,

Et chaud, et froid, et vent, et pluie, et tonnerre,

Veut qu' à sa guide passions mer tous les preux,

Ainsi comme guida Melchior et Gaspar.

(3) “Car je sais d' où viens et où vais.”

(4) Vers quelque part que je vais, et me tourne, et me vire.

(5) Si me fussiez à raison,

Bonne dame, et à droit.


OU, o, ou.

Cette conjonction fut formée d' AUT latin, qui, après la suppression du T eut le son d' O, ainsi qu' AURUM eut celui d' OR. AU fut aussi écrit et prononcé OU.

“Qui las te tod, ou las te tola... Comuniras OU cumunir me faras." (1) Actes de 960. MS. de Colbert.

“Que a dreit aura OU a merce.” (2)

Acte de 1063. Pr. de l' Hist. de Languedoc t. II, col. 247.

So laissas per mal, O per be,

Per ira, O per joi, O per que. (3)

Bernard de Ventadour: Peirols com avez.


Particules disjonctives.

NE, NI, ni.

NEC latin produisit d' abord NE, et ensuite NI romans.

“NE nus s' en recreira ne recredent no 'n sera.” (4) Actes de 960. Ms. de Colbert.

Davan son vis nulz om no s pot celar;

NE eps li omne qui sun ultra la mar. (5) Poeme sur Boece.

(1) "Qui les te prend, on les te prenne... Avertiras ou avertir me feras."

(2) "Qui à droit aura ou à merci."

(3) Cela laissez pour mal, ou pour bien,

Pour tristesse, ou pour joie, ou pour quoi.

(4) "Ni nul s' en lassera ni lassé n' en sera."

(5) Devant son visage nul homme ne se peut celer;

Ni même les hommes qui sont outre la mer.


E paratges no i des, ren NE i tolgues. (1)

Rambaud d' Orange: Aissi com selh.

Al seu voler no m vuelh ieu defendre, 

NE enves lieis de nulha re contendre. (2)

Rambaud d' Orange: Si de trobar.


J' examine à-présent NI dans sa seconde acception; il est a remarquer que lorsqu' il signifie ne, et non et, il y a dans la phrase la négation NON:

Non avent macula NI ruga. (3)

Doctrine des Vaudois.

Car non ai loc de vos vezer,

Joi NI deport non puesc aver. (4) 

Arnaud de Marueil: Dona genser. 

No sui alegres, NI iratz;

No sui estrayns, NI privatz. (5)

Comte de Poitiers: Farai un vers.

E ancmais non auzim dir

NI per meravilhas comtar. (6) 

Bernard de Ventadour: En abril. 

(1) Et paratge n' y donnât, rien ni y ôtât.   

(2) A son vouloir ne me veux je défendre,

Ni envers elle de nulle chose disputer.

(3) N' ayant macule ni ride.

(4) Parce que n' ai lieu de vous voir,

Joie ni amusement ne puis avoir.

(5) Ne suis alègre, ni triste;

Ne suis étrange, ni familier. 

(6) Et oncques mais n' ouïmes dire

Ni pour merveilles conter.


SI NON, sinon.

SI NON, venant du latin, fut employé de deux manières dans la langue romane.

La première, en conservant rapprochés les deux éléments SI et NON; et alors si fut immédiatement suivi de NON:

Una domna am finamen

Que m dis que no m' amaria,

C' amic a don no s partria, 

SINON per aital coven. (1)

Gaucelm Faidit: N' Ugo de la Bachalayria.

La seconde, en les séparant; mais SI fut toujours placé le premier:

Non ho dic mia per gap, SI per ver NON. (2)

Richard Ier, Roi d' Angleterre: Ja nuls hom.

Tant es mortals lo danz que no i a sospeisson

Que jamais si revenha, s' en aital guisa NON, 

Qu' om li traga lo cor, e qu' en manjo 'l baron

Que vivon descorat; pois auran de cor pron. (3)

Sordel: Planher vuelh.

(1) Une dame aime purement

Qui me dit que ne m' aimerait,

Vû qu' ami a dont ne se séparerait,

Sinon par tel accord.

(2) Non cela dis mie par raillerie, si pour vrai non.

(3) Tant es mortel le dommage que n' y a soupçon 

Que jamais se répare, si en telle guise non, 

Qu'on lui tire le cœur, et qu' en mangent les barons

Qui vivent découragés; et puis auront de cœur assez.


Particules explétives.

A la négation NON la langue romane joignit souvent des particules explétives, qui augmentèrent la force même de la négation.

Ainsi RES, GAIRE, GES, MIA, PAS, remplirent cette fonction.

RES, signifiant chose:

Nuls homs ses amor REN NON vau. (1)

Bernard de Ventadour: Ges de chantar.

Ja REN NON dirai. (2)

Arnaud de Marueil: Aissi com selh.

GAIRE, dont il a été parlé précédemment, forma, dans le même sens que RES, une particule explétive jointe à NON, et signifiant grand chose, beaucoup:

Ma NO us cal del mieu dan GUAIRE. (3)

Rambaud d' Orange: Amicx.

GES vint de Gens, personne, aucun.

On trouve GENS dans le poëme sur Boece:

Ella s fen sorda; GENS a lui NON atend. (4)

NO m mogui GES. (5)

Comte de Poitiers: En Alvernhe.

(1) Nul homme sans amour chose ne vaut.

(2) Jamais chose ne dirai.

(3) Mais ne vous chaut de mon dam grand-chose.

(4) Elle se feint sourde; aucunement à lui ne fait attention.

(5) Ne me remuai aucunement.


GES NO l' aus mostrar ma dolor.

Arnaud de Marueil: A guisa de fin.

Quar mon cor forsa d' amar lai

On sai be qu' amatz NO sui GES. (2)

Arnaud de Marueil: Cui que fin' amors.


MICA, MIA, MINGA, mie, point, furent les modifications de MICA latin, miette.

On trouve MICA, MIGA dans le Poëme sur Boece.

Pero no desesper MIA. (3)

Bernard de Ventadour: En abril quan vei.

E datz m' en un, Sordel, qu' ieu no 'n ai MIA. (4)

Blacasset: Er cinq en podetz.

Del tot mi sui viratz,

Totz enicx e forsatz,

A so que no m plai MIA. (5)

Bertrand d' Alamanon: Lo segle m' es.

E conosc ben

Que no 'lh dey mostrar MINGUA

Vas lieis mo mal talen. (6)

Sail de Scola: Gran esfortz.

(1) Aucunement ne lui ose montrer ma douleur.

(2) Car mon coeur force d' aimer là

Où sais bien qu' aime ne suis aucunement.

(3) Pourtant ne désespère mie.

(4) Et donnez m' en un, Sordel, vû que je n' en ai mie.

(5) Entièrement me suis tourné,

Tout contraint et forcé,

A ce qui ne me plaît mie.

(6) Et connais bien

Que ne lui dois montrer mie

Vers elle ma male volonté. 

 

No portaras MINGA l' enfant. (1)

Roman de Jaufre.


PAS, pas, point, particule explétive venant de PASSUS latin:

Car aquel que ha entendament po pensar entre si

Qu' el NO s' es PAS forma, ni li autre asi...

E vol mudar la lei que devant avia dona;

El NO la muda PAS qu' il fos abandona,

Ma la renovelha qu' il fos melh garda. (2) 

La Nobla Leyçon.

Sofrir m' er la pen' e 'l afan

Totz temps, NON PAS dos jorns ni tres. (3)

Peyrols: Eu non laudarai.

D' aisso No us sai PAS esmenda. (4)

Pons de la Garde: Mandar m' es.

Que sols N' en anaretz vos PAS. (5)

Roman de Jaufre.

(1) Ne porteras mie l' enfant.

(2) Car celui qui a entendement peut penser entre soi

Qu' il ne s' est pas formé, ni les autres aussi...

Et veut changer la loi que devant avait donnée,

Il ne la change pas afin qu' elle fût abandonnée,

Mais la renouvelle afin qu' elle fût mieux gardée.

(3) Souffrir me sera la peine et le chagrin

Toujours, non pas deux jours ni trois.

(4) De ceci ne vous sais pas excuse.

(5) Que seul n' en irez vous pas.


Interjections, exclamations.

La langue romane eut aussi de ces particules indéclinables, et employées dans un sens absolu, qu'on nomme interjections, exclamations, et qui servent à exprimer les sentiments de surprise, de douleur, d' admiration, etc. Il suffit d' indiquer les plus ordinaires: 

AI, ah! qui vint peut-être du grec *aï et *ai. 

AI! quantas bonas chansos

E quants bons vers aurai fag! (1)

Bernard de Ventadour: Ai! quantas.

AI! cal vos vi, e cal vos vei! (2)

Bernard de Ventadour: Era non ai.


LAS, venant de LASSUS, malheureux, produisit ensuite AILAS, HALAS! las, hélas!

LAS! e donc que m farai? (3)

Blacas: Lo bels douz temps.

AILAS! caitiu, que sabras dire? (4) 

Pons de Capdueil: Ben sai que. 

AILAS! perque viu lonjamen ni dura

Cel que totz jorns ve creisser sa dolor? (5) 

Aimeri de Bellinoi: Ailas! per que.

HALAS! quant cuiava saber

D' amor, e quant petit en sai! (6)

Bernard de Ventadour: Quan vei la laudeta.

(1) Ah! combien bonnes chansons

Et combien bons vers aurai fait.

(2) Ah! quel vous vis, et quel vous vois!

(3) Las! et donc quoi je ferai?

(4) Hélas! pourquoi vit longuement et dure

Celui qui tous jours voit croître sa douleur?

(6) Hélas! combien cuidais savoir

D' amour et combien peu en sais!


Chapitre 8 - Idiotismes